toutes ces maisons sous-louées, déterminèrent le nombre d’adultes qui pouvaient y coucher, et communiquèrent leurs renseignemens à l’administration de la ville. Un employé, après avoir transcrit ces mêmes détails sur un registre, prépare deux pancartes, l’une constatant le nombre de chambres et qui doit être clouée dans l’appartement du principal locataire, l’autre qui doit être fixée à la porte de chacune de ces chambres et qui spécifie le nombre de personnes autorisées à y demeurer[1]. Pour s’assurer d’ailleurs que ces prescriptions sont observées, les inspecteurs ont le droit de visiter le jour ou la nuit toutes les maisons enregistrées dans lesquelles ils soupçonnent une infraction aux règlemens.
Il a fallu la pression d’un danger public pour, qu’une telle mesure pût s’introduire sans trop de résistance. L’ouvrier anglais jetterait par les fenêtres un constable qui oserait forcer de nuit l’entrée de sa demeure ; mais il respecte la visite des inspecteurs du comité de salubrité publique, sachant bien qu’ils agissent au nom d’un intérêt qui le touche, lui et sa famille. Si ce n’était point la loi qui frappe à sa porte, ce serait peut-être la mort. L’officier médical m’a néanmoins paru exercer à regret une surveillance dont il ne se dissimule point la grave responsabilité. En franchissant le seuil du pauvre, l’autorité a en quelque sorte pris l’engagement d’améliorer la condition des classes souffrantes. Ce n’est point par plaisir que les Irlandais, les hommes de peine, les journaliers du port, s’entassent à Liverpool dans des logemens malsains. Tant qu’on ne s’occupera point de construire pour eux des demeures plus convenables et mieux aérées, les meilleurs règlemens du monde modifieront très peu les causes de mortalité. Le conseil municipal l’a très bien compris : aussi a-t-il proposé lui-même un plan pour ériger des maisons modèles et a-t-il dépensé en 1865 la somme de 21,306 livres sterling en achat de terrains destinés à être couverts par des logemens d’ouvriers, work-men’s dwellings. En perfectionnant le caractère des habitations, on élève le moral des habitans ; mais un autre obstacle s’oppose aux bonnes intentions du conseil : c’est l’insuffisance des salaires. Un portefaix gagnant 12 shillings par semaine, ayant une femme et trois enfans (ce qui est très ordinaire), ne peut mettre tous les huit jours plus de 2 shillings 6 d. à son loyer. Vainement construira-t-on au prix de certains sacrifices des maisons excellentes et peu coûteuses, ces maisons, seront toujours trop chères pour lui ; il se contentera d’être mal logé et à peu de frais. Or l’insuffisance des salaires dans la riche ville de Liverpool est un fait économique sur
- ↑ En 1867, 2,535 maisons ont été ainsi mesurées, enregistrées et soumises à la surveillance de l’officier médical.