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abaissent encore la dépense moyenne des études en Allemagne. Le professeur peut à son gré dispenser l’élève de toute rétribution. Il le fait toujours pour les étrangers qui lui sont présentés, et nous avons trouvé partout cette hospitalité du savoir largement pratiquée. Un autre usage dispense de la rétribution les fils des professeurs et de tous les dignitaires de l’université jusqu’au secrétaire. La faculté elle-même peut accorder la remise de la totalité ou de la moitié de la rétribution aux étudians qui justifient de leur indigence et témoignent en même temps, par un examen spécial, de leur instruction et de leur aptitude. On évalue à près de 1,200, c’est-à-dire à un cinquième du nombre des étudians allemands, ceux qui profitent de ces immunités. La dispense des frais d’étude prend aussi dans la plupart des facultés la forme de bourses fondées par l’état, par des communes, par des particuliers. A Greifswald, où l’université n’est fréquentée que par 350 étudians, il y a plus de quarante bourses. On les répartit au concours entre les étudians qui produisent un certificat d’indigence. Il y a d’autres fondations d’un ordre plus humble : l’université dispose toujours dans un restaurant de la ville d’un certain nombre de pensions gratuites qu’on donne chaque semestre à des étudians pauvres à la suite d’un examen spécial, lequel se fait avec une certaine solennité devant la faculté assemblée, et roule uniquement sur les matières enseignées pendant le semestre qui vient de finir. Signalons enfin des institutions qui, pour être conçues dans un esprit plus moderne, n’attestent pas moins énergiquement cette constante sollicitude de la mère commune, l’alma mater, pour ses enfans malheureux. Il existe à Heidelberg, depuis 1863, une association de secours pour les étudians malades. Les professeurs font partie de l’association. Les étudians paient une cotisation semestrielle qui n’excède pas 30 kreutzer, encore en sont-ils dispensés en cas d’indigence. Les professeurs apportent leur temps, leurs soins et leur bonne volonté. Les malades ont dans l’hôpital une salle spéciale ; ils choisissent le médecin qu’ils veulent. Ceux qui en ont les moyens paient pension, les autres sont soignés gratuitement. Le conseil de l’association se compose du protecteur[1], des deux professeurs de clinique de la faculté de médecine, d’un médecin de la ville, de deux professeurs élus chaque année par le sénat et de cinq étudians. On remarquera la place faite dans le conseil à l’élément extra-universitaire. La présence du médecin de la ville est une infraction aux anciennes mœurs de corporation ; on peut la regarder comme un véritable progrès.

Si nous avons rappelé les facilités que trouvent en Allemagne les

  1. A Heidelberg, le recteur est le grand-duc. Le premier magistrat de l’université prend le titre de prorecteur. Il a d’ailleurs toutes les prérogatives et toute l’indépendance des autres recteurs.