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dont le prix s’est élevé de 110 à 150 francs après avoir atteint le chiffre de 275 francs en 1857.

On est frappé de l’augmentation du prix des choses, parce qu’elle s’applique surtout à celles qui tiennent à l’alimentation et à la main-d’œuvre; la vie s’est trouvée ainsi sensiblement plus chère qu’autrefois, et il n’est pas étonnant qu’on s’en préoccupe. Cette augmentation pourtant n’est pas générale. Le fait qui ressort de ce qui précède est que les résultats sont très différens suivant qu’il s’agit de telle ou telle marchandise. Les marchandises dont la production est presque illimitée, qui peuvent augmenter au fur et à mesure des besoins, dont tous les progrès de la science et de l’industrie concourent à rendre la fabrication plus économique, diminuent de valeur : les articles manufacturés se trouvent dans ce cas. Celles au contraire dont la production ne peut pas toujours suivre les besoins, surtout si les besoins augmentent rapidement, telles que la viande et certaines denrées alimentaires, subissent une hausse considérable. Il en est de même pour les matières premières, qui sont plus recherchées aussitôt que l’industrie prend plus d’activité. Les comestibles végétaux n’ont pas beaucoup varié, parce que le marché s’est agrandi autant que cela est devenu nécessaire. On ne peut pas faire venir de la viande, du beurre et des œufs de partout; la cherté et la difficulté des transports s’y opposent, tandis que pour le thé, le café, le cacao, l’huile, on peut en demander aux pays les plus lointains : les transports ne sont ni difficiles ni relativement très coûteux. C’est ce qui explique la fixité relative du prix de ces denrées. Quant aux métaux dits de première fusion, l’économie dans les procédés d’extraction et de mise en œuvre a pu contre-balancer la plus grande demande dont ils ont été l’objet, et les prix n’ont pas changé. Ce qui a beaucoup augmenté aussi, et ce dont il n’est question ni dans les tableaux de M. Jevons ni dans ceux que nous venons d’analyser, ce sont les salaires; depuis 1847, ils se sont certainement élevés de plus de 30 pour 100. Ils avaient déjà monté de 10 à 15 pour 100 dans les vingt années précédentes; la viande aussi se payait plus cher en 1847 qu’en 1827.

Si au lieu de confondre dans un même bloc des marchandises dont les variations obéissaient à des causes très diverses, si au lieu de faire une moyenne générale, ce qui est vraiment l’abus de la statistique, M. Jevons s’était donné la peine d’entrer dans les appréciations particulières, il aurait bien vile découvert la véritable cause de ces variations, il se serait expliqué pourquoi elles ont été plus grandes depuis 1848, car nous ne contestons pas que, considéré en général, le prix des marchandises ne soit aujourd’hui plus élevé qu’il y a vingt ans. Cette cause est tout simplement le progrès de la