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difié les prix, et de dire si ces causes viennent de la dépréciation de la monnaie ou d’ailleurs.


I.

Avant d’aborder en cette étude les faits contemporains, nous devons dire un mot de ce qui a eu lieu dans le passé, et notamment après la découverte de l’Amérique en l492. Il y a bien chez les auteurs qui se sont occupés de la question quelques divergences sur la façon de mesurer la variation des prix, et même sur la quantité de métaux précieux qui ont pu être fournis à telle ou telle époque. Ce sont après tout des divergences de détail, elles n’ont aucune importance pour les données principales du problème. Ainsi on est généralement d’accord, et c’est Adam Smith qui le premier a fait cette constatation, que, dans les cent cinquante années qui ont précédé la découverte de l’Amérique, les métaux précieux, par des causes diverses, tendaient à devenir plus rares, et acquéraient plus de valeur. On suppose même que durant ce laps de temps la plus-value aurait été de moitié, c’est-à-dire que la quantité de blé qui se payait 4 onces d’argent en 1350 n’en valait plus que 2 en 1492. De l492 à 1530, jusqu’au moment où les Espagnols se rendirent maîtres à la fois du Mexique et du Pérou, la production des métaux précieux, qui consistait surtout en or, fut peu importante; elle ne changea rien à la situation, les prix continuèrent à baisser. Ils baissèrent encore après 1530 malgré une production plus considérable. Ce ne fut qu’à partir de 1545, lorsqu’on eut découvert les fameuses mines de Potosi, si riches en argent, que les prix s’arrêtèrent; mais ils ne commencèrent à s’élever sérieusement qu’après 1570. Ce n’est pas que les gisemens aient été alors plus féconds qu’auparavant. M. de Humboldt calcule au contraire que ces fameuses mines de Potosi, qui en 1545 rendaient 50 pour 100 d’argent pur sur le minerai qui était extrait, n’en rendaient plus que 20 pour 100 en 1574, et de cette dernière date à 1789 le degré de productivité, toujours selon M. de Humboldt, baissa dans la proportion de 174 à 1. Cependant on avait en 1571 trouvé des mines de mercure, on se servit des produits pour séparer l’argent plus facilement des matières auxquelles il était mêlé. Ceci, joint à d’autres améliorations et à une exploitation plus étendue, fit que le rendement total ne diminua point, qu’il augmenta plutôt; les prix commencèrent à s’en ressentir et à monter assez vite. On établit généralement que cette élévation eut lieu dans la proportion de 200 pour 100, et qu’elle atteignit son maximum vers