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l’irrigation. Cette terre présente tous les contrastes, depuis les cimes neigeuses de la Sierra d’Estrella jusqu’aux rivages méridionaux, qui semblent détachés de la côte d’Afrique. La constitution générale est volcanique, et les tremblemens de terre ont été fréquens et terribles.

Le royaume a une superficie de 9 millions d’hectares, sans compter les îles, ou le sixième de la France. On le divisait autrefois en six provinces. Aujourd’hui on l’a partagé, à l’instar de la France, en dix-sept districts ou départemens. Au point de vue agricole, M. Rebello da Silva y distingue quatre régions d’une étendue inégale, le nord, le centre, le sud et les montagnes. Il me paraîtrait plus simple de n’en admettre que trois ayant chacune 3 millions d’hectares. La première, qu’on peut appeler la région maritime ou occidentale, s’étend le long de l’Océan; elle comprend l’ancienne province de Minho, un des pays les plus riches et les mieux cultivés de l’Europe, la moitié de la province de Beïra et une grande partie de l’Estrémadure; c’est de beaucoup la plus féconde et la plus prospère. La seconde, qu’on peut appeler la région montagneuse ou orientale, se compose de l’ancienne province de Tras-os-Montes et du reste de la Beïra et de l’Estrémadure; elle est toute hérissée de montagnes. La troisième, la région du sud, comprend l’Alemtejo (pays au-delà du Tage) et la petite province de l’Algarve; c’est la plus inculte. A ces trois divisions répondent trois climats : sur le littoral humide et chaud, dans les montagnes variable et tempéré, dans le sud extrêmement chaud et sec.

D’après cet essai de statistique rurale, il n’y aurait en tout que 2 millions d’hectares cultivés; 7 millions d’hectares sur 9, plus des trois quarts du sol, seraient incultes. Un examen plus approfondi révélera probablement une plus grande étendue de terres ouvertes. On aura sans doute confondu une partie des jachères avec les terres incultes. Il y a des champs qui ne sont cultivés que tous les dix ans; dans quelle catégorie faut-il les placer? De même on n’attribue aux bois qu’une étendue de 100,000 hectares, ou un peu plus du centième du sol. Si déboisé que puisse être le Portugal, j’ai peine à croire qu’il le soit à ce point. On n’aura tenu aucun compte des terrains à demi boisés, comme il doit s’en trouver beaucoup. Un rapport adressé au ministre des travaux publics en 1868 par l’Institut géographique de Lisbonne porte l’étendue des terrains réellement incultes à la moitié environ de la superficie totale, ou 4,500,000 hectares. Là doit être la vérité. La différence sans doute est remplie par les terrains à demi cultivés et à demi boisés. Il va sans dire que la plus grande partie des terres cultivées se trouve dans la zone du littoral; les deux autres ne présentent que de rares oasis autour des villes, séparées par des montagnes ou par des landes (charnecas).

L’Abrégé d’économie rurale évalue à 562 millions le produit brut des terres. Je serais porté à croire qu’il y a quelque exagération dans ce chiffre. On y fait figurer le travail des bœufs pour 21 millions; mais le