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d’autre continuellement observées[1]? » Pie VII, que ses plus intimes serviteurs hésitaient à interroger, et qui n’aima jamais à s’expliquer sur les incidens de cette entrevue de Fontainebleau, a toujours nié les voies de fait. Il a donné seulement à entendre que l’empereur lui avait parlé avec « hauteur et mépris, jusqu’à le traiter d’ignorant en matières ecclésiastiques[2]. » De son côté. Napoléon, dans les notes dictées à Sainte-Hélène, ne dit absolument rien au sujet des entretiens de Fontainebleau. Il se borne à affirmer qu’il fit preuve en cette circonstance « de plus de patience que ne comportaient sa situation et son caractère[3]. » Pour notre compte, nous n’avons rien trouvé, malgré tous nos efforts, dans les nombreux documens passés sous nos yeux qui nous autorisât à confirmer ou à démentir les témoignages malheureusement contradictoires soit de Napoléon, soit de Pie VII; mais si l’on connaît mal le détail des conférences personnelles entre Pie VII et Napoléon à Fontainebleau, le résultat en est au contraire authentique. A parcourir seulement le texte du nouveau concordat, on s’aperçoit d’abord que l’empereur n’hésita point à rabattre beaucoup de ses prétentions primitives. Toutes les clauses qui, d’après l’évêque de Nantes, avaient à première vue si fort effarouché le saint-père en ont totalement disparu. Il n’est plus question ni des quatre propositions de l’église gallicane, ni de l’intervention des puissances catholiques dans la composition du sacré-collège. La résidence à Paris n’est pas textuellement imposée au saint-père ; il est seulement indiqué en termes un peu vagues qu’il se fixera en France ou dans le royaume d’Italie. Avignon paraît avoir été la ville préférée par Pie VII. L’empereur a cessé d’exiger que les cardinaux noirs fussent blâmés, et n’impose plus au souverain pontife l’obligation de bannir à tout jamais de sa présence les cardinaux di Pietro et Pacca. Il y a plus, s’il maintient le terme fatal de six mois pour l’institution canonique des évêques, il octroie en retour certaines concessions qui tenaient fort au cœur du pape, et qu’à Savone il lui avait impitoyablement refusées. Les six évêchés suburbicaires de Rome étaient rétablis et rendus à la nomination du saint-père. Il avait en outre le droit de nommer directement, soit en France, soit en Italie, à dix évêchés qui devraient être ultérieurement désignés. À l’égard des évêques des états romains absens de leurs diocèses par suite des événemens, le pape pouvait les nommer à des évêchés in partibus en attendant qu’ils fussent replacés aux sièges vacans soit de l’empire, soit du royaume d’Italie. L’empereur

  1. Les Quatre Concordats, par l’abbé de Pradt, t. III, p. 6.
  2. Mémoires de Napoléon, t. IV, p. 212.
  3. Œuvres complètes du cardinal Pacca, t. Ier, p. 317.