Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 82.djvu/1010

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nombreuse que bien choisie, le cardinal Fesch, qui avait également survécu à son neveu l’empereur Napoléon et à son petit-neveu le duc de Reichstadt, s’éteignit doucement à Rome le 13 juillet 1839.

Nous nous reprocherions de paraître oublier, fût-ce un instant, le cardinal Consalvi. Est-il besoin de dire qu’aussitôt remis en possession de sa souveraineté, Pie VII n’eut rien de plus pressé que de rétablir son plus dévoué serviteur et son ami dans son ancien poste de la secrétairerie d’état? Consalvi assista en cette qualité au congrès de Vienne. Son influence y fut considérable. Il avait particulièrement gagné, dans un rapide voyage à Londres, les bonnes grâces du prince régent de la Grande-Bretagne, et le concours de la protestante Angleterre ne lui servit pas médiocrement pour soutenir à Vienne, les intérêts temporels du saint-siège. Une autre singularité de sa carrière politique fut d’avoir à défendre contre le gouvernement de la restauration celles des clauses du concordat qu’il avait jadis signées le plus à contre-cœur. Il se tira de cette embarrassante épreuve avec sa dextérité ordinaire et sans jamais tomber dans aucune flagrante contradiction. Il nous serait agréable de pouvoir ajouter que Consalvi, redevenu tout-puissant à Rome, essaya de mettre un terme aux abus d’une administration dont il a fait lui-même une si triste peinture dans les mémoires rédigés à Reims durant sa captivité. Ses efforts, s’il en tenta, demeurèrent absolument infructueux. Consalvi, malgré sa prodigieuse clairvoyance et son incontestable honnêteté, était avant tout, et beaucoup plus que Pie VII, un homme d’ancien régime. En Italie, non plus que dans le reste de l’Europe, à Rome moins que dans tout le reste de l’Italie, le cours de l’opinion ne portait nullement alors aux réformes; un bien petit nombre d’esprits étaient seuls capables d’en comprendre l’opportunité. Le clergé et les classes inférieures réclamaient au contraire le retour le plus complet vers l’ancien état de choses. Consalvi céda volontiers à l’entrainement général, qui ne le contrariait guère. Il exerça pendant tout le pontificat de Pie VII une autorité modérée, et qui n’ajouta rien à sa réputation. Son existence fut à la fois celle d’un favori et d’un ministre tout-puissant. Malheureusement pour lui, les mérites du ministre n’étaient point de nature à faire taire, si grand que fut resté son désintéressement, les mille jalousies qu’excite partout, à Rome encore plus qu’ailleurs, cette position de favori. Au moment de la mort de Pie VII, Consalvi était tombé dans la disgrâce du public. Peut-être y aurait-il été indifférent, il ne le fut point à la perte du maître qu’il avait aimé et si bien servi; il le suivit de près dans la tombe.

Il ne nous reste plus qu’à parler maintenant de Pie VII et de Napoléon, et à montrer comment se sont exprimés sur le compte l’un de l’autre, leur querelle vidée, ces deux personnages « si sin-