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avec violence, la nuit, sur la voie publique, 296, — avec escalade, effraction ou fausses clés, pendant le jour, 649, pendant la nuit, 679 ; vols par salariés, 770 ; dans les maisons garnies, 56 ; par recel, 66 ; vols simples, 6,260 ; vol à l’américaine, 2. Ainsi qu’on le voit, les vols simples sont en majorité considérable, et plaident, toute mesure gardée, en faveur des voleurs de Paris, qui sont bien plutôt tentés par l’occasion que machinateurs de crimes qualifiés. Cela prouve aussi qu’ils sont prudens, et que, s’ils ne savent pas éviter la prison, ils réussissent du moins à se soustraire aux bagnes et à la déportation outre-mer. Deux vols seulement à l’américaine dans l’espace de douze mois dénotent une amélioration sensible dans l’intelligence de la population, qui, il y a quelques années à peine, se laissait fréquemment affriander par les gros bénéfices illicites que les faux Anglais offraient aux gens simples et avides.

La France, l’Europe, l’univers entier, concourent à former les bandes qui exploitent Paris ; on y rencontre des Chinois, des Persans, des Turcs. Les étrangers sont en fort petit nombre, il est vrai, dans les tapis-francs ; mais du moins ils y sont représentés, et donnent par leur présence aux voleurs de la grande ville un caractère de cosmopolitisme qu’il est curieux de constater. 698 Italiens, 738 Belges, 273 Prussiens, 232 Suisses, 70 Américains et bien d’autres venus de pays limitrophes ont passé sous les verrous[1]. Les départemens français les plus riches en ce genre de population sont : Seine-et-Oise, 1,152 ; la Moselle, 909 ; la Seine-Inférieure, 668 ; l’Aisne, 732. Les plus pauvres, et il faut les en féliciter, sont : Vaucluse, 18 ; Alpes-Maritimes, 14 ; Var, 12 ; Landes, 11. Comme toujours et en toutes choses, le département de la Seine garde la suprématie, et s’élève au chiffre de 10,479.

Les corps de métiers apportent aussi, en proportions fort diverses, leur contingent à ce total. En tête et en nombre exceptionnel se présentent les journaliers, qui ont eu 10,376 des leurs mis en prison. Ici l’étiquette est trompeuse, et il ne faut pas s’y laisser prendre. Tous les déclassés, tous les fainéans, tous les ouvriers qui, par défaut d’aptitude ou par manque de travail, ont abandonné leur atelier, vont sur les chantiers de terrassement essayer de manier la pioche, tous ceux qui, n’ayant aucun état, ne vivent que de fraude et de mendicité, lorsqu’on les interroge sur leur profession, répondent : journalier. Après eux, mais très loin, viennent les maçons, 1,975 ; les domestiques, 1,176 ; les serruriers-mécaniciens, 1,132 ; les employés, 1,046, et ainsi de suite ; je ne sais guère quelle fonction sociale ne prend part à des manœuvres

  1. Le nombre total des étrangers arrêtés en 1868 a été de 2,978.