Tibet et de la Chine, sans compter ceux des Russies, la suivraient.
Quand les peuples rangés sur une de ces trois lignes ont une politique commune, ils prospèrent, parce que leurs intérêts sont les mêmes. Si l’un d’eux veut prendre pied sur la ligne contiguë, il en trouble la sécurité sans profit pour lui-même. Si un peuple de la ligne septentrionale fait une alliance offensive avec un des peuples du sud, celui qui est entre les deux court des risques dans son indépendance ; l’interruption de mouvement qui en résulte est ressentie sur toute la ligne, et pousse les peuples à s’allier entre eux contre les agresseurs. Les alliances du sud au nord sont de vraies coalitions, aussi contraires à la morale qu’à la saine politique, mais dont les effets sont considérables. Les alliés naturels de la Grèce sont l’Italie, la France, l’Angleterre, même la Turquie et l’Égypte. Ceux du sultan sont la Perse et l’Angleterre au sud-est, les peuples danubiens, l’Autriche, la Prusse et encore l’Angleterre au nord-ouest. La Russie est à peu près seule, et sa solitude ira croissant jusqu’au jour où elle aura prouvé qu’elle ne convoite aucun point de la ligne centrale. Jusque-là les Grecs ne sont pas moins intéressés que les Turcs à se tenir en garde contre ses empiétemens. La ligne transversale de navigation formée par la Mer-Noire, les détroits et la mer Egée coupe les deux grandes lignes méridionales du vieux continent ; si les frégates russes l’occupaient, la Grèce, après le sultan, serait la première anéantie, ses ports serviraient de refuge à cette marine, toujours en guerre avec l’Occident, une incroyable perturbation se produirait dans le commerce du monde. On ne peut donc trop louer l’intelligence et la rectitude d’idées des hommes qui rédigent le Néologos de Constantinople, et qui se sont donné pour tâche d’arrêter les progrès du panslavisme en préparant une alliance entre la Grèce et la Turquie. Je constate que cette idée, fortement appuyée par les derniers événemens, fait des progrès rapides dans le monde grec ; il est probable que d’ici à peu de temps elle prévaudra, car elle est la seule vraie.
L’avenir de la Grèce exige donc impérieusement qu’elle cherche son point d’appui en Occident, et qu’elle agisse d’accord avec la Turquie : la Turquie est sa préservatrice vers le nord ; l’Occident est le lieu d’où la science, avec ses applications et avec la richesse qu’elle engendre, doit lui venir ; elle ne peut pas les créer, et elle ne peut pas non plus les chercher ailleurs. Les expériences qu’elle a faites sont assez nombreuses, le moment est venu pour elle d’entrer dans le grand courant de civilisation pratique où sa position géographique l’a placée. Le temps du palikarisme est passé : trois générations se sont succédé depuis quarante ans. La première était brave et ignorante, elle a combattu pour la liberté et conquis