Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 81.djvu/271

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
265
CHRYSOSTOME ET EUDOXIE.


se ferait contre lui, se recommandant par là honteusement aux faveurs de la cour. On en cite un qui avait eu la bonne idée de venir à Constantinople avec le dessein de défendre l’accusé, et qui regagna précipitamment son diocèse quand il vit les menées du parti contraire, et entendit les menaces qu’on proférait autour de lui. Ce pauvre homme se nommait Théodorus ; il occupait le siège de Tyane en Cappadoce ; c’était pourtant, au dire des contemporains, un sage et grave prélat : ces contemporains, à ce qu’il paraît, ne rangeaient pas le courage parmi les dons de la sagesse. Les évêques qui arrivaient, à quelque parti qu’ils appartinssent, avaient cru pouvoir en arrivant communiquer avec Chrysostome, ne fût-ce que pour éviter la récusation qu’il avait faite de Théophile, lors du concile du Chêne, pour ne l’avoir point visité comme évêque du lieu ; Arcadius les en blâma vivement, et les visites s’arrêtèrent. Toutefois, malgré les intrigues et les peurs, il se groupa autour de lui, les uns disent quarante, les autres quarante-deux évêques, qui lui restèrent fidèles jusqu’à la fin, sur plus de cent que peut avoir réuni le concile. De part et d’autre se signalèrent des hommes nouveaux qui n’avaient point figuré au synode du Chêne, et jetèrent quelque éclat dans celui-ci sous un drapeau ou sous l’autre. Nous les mentionnerons au fur et à mesure dans les détails de notre récit. Du côté de la cour, ce fut encore Acacius, Antiochus, Sévérien et Cyrinus de Chalcédoine qui formèrent le noyau autour duquel se rallia le parti ennemi de l’archevêque.

La statue d’Eudoxie avait été inaugurée à la fin de septembre 403, et déjà au commencement de janvier 404 le concile se constituait. Quelques jours auparavant avait eu lieu la fête de la nativité du Christ, la seconde des grandes solennités chrétiennes, où l’empereur et la famille impériale avaient coutume de se rendre à la basilique métropolitaine pour y assister aux saints mystères. Arcadius déclara qu’il ne s’y rendrait point cette année, ne voulant pas, disait-il, communiquer avec l’archevêque que celui-ci n’eût purgé sa condamnation. Cet acte tout nouveau, car depuis la rentrée de Chrysostome il n’avait jamais été question d’un tel empêchement, parut à beaucoup un mot d’ordre descendu du trône sur le concile et une condamnation anticipée. — La session s’ouvrit sous ces auspices.

II.

L’objet de la convocation avait été, ainsi que nous l’avons dit, la révision du procès du Chêne ; Chrysostome la demandait dans l’intérêt d’une justification éclatante, ses ennemis l’accordaient pour confirmer et aggraver au besoin la sentence de condamnation : c’é-