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complet, avec une chambre de représentans élus par les censitaires. La province continentale qui fait face à l’île de Vancouver, entre le golfe de Géorgie et les Montagnes-Rocheuses, n’était pas moins bien organisée, quoique aussi peu peuplée. Là aussi les colons n’arrivaient qu’en petit nombre, et parfois ils repartaient au bout de quelques semaines faute d’avoir obtenu tout de suite les terres qu’ils étaient venus chercher.

Un événement inattendu vint modifier la situation, ce fut la découverte de l’or dans la vallée du Fraser. Depuis longtemps, le bruit s’était répandu qu’il existait des gisemens aurifères dans cette partie des Montagnes-Rocheuses. Les Indiens apportaient quelquefois de petites pépites qu’ils vendaient fort bon marché aux employés de la compagnie ; mais celle-ci n’encourageait pas les recherches de ce genre. En 1857, une petite troupe de mineurs canadiens franchit la frontière américaine et vint prospecter, — c’est le terme usuel des explorateurs à la recherche de l’or, — les bords des rivières Thomson et Bonaparte. Dès que l’on sut qu’ils avaient réussi, la foule accourut sur ces nouveaux placera. Les mines du Sacramento avaient entraîné vers l’extrême ouest tous les aventuriers de l’Amérique du Nord ; celles du Caribou attirèrent à leur tour un flot subit de gens nomades et turbulens qui se jetèrent au hasard sur l’un des districts que la compagnie de la baie d’Hudson avait le plus négligé. Cette région était restée presque déserte, bien qu’il y eût des ports admirables, des terres fertiles, de vastes forêts, tous les élémens de richesse que l’homme peut désirer avec un climat qui rappelle sous bien des rapports celui de l’Angleterre. Dès que l’on sut que le plus précieux de tous les métaux y abondait, la population accourut de toutes parts. C’étaient non-seulement des chercheurs d’or, mais aussi des industriels de tout métier, car on n’était plus au début des exploitations aurifères, alors que tout individu valide avait d’autre but en allant aux placers que de fouiller et de laver le sol. Par l’expérience de ce qui s’était produit en Californie, ou avait appris qu’il y a autant de profit et moins de fatigue à se faire marchand de comestibles ou entrepreneur de transports. La ville de Victoria et sa rivale, New-Westminster, sur le continent à l’embouchure du Fraser, se développèrent rapidement. Le gouvernement anglais reprît ces provinces à la compagnie de la baie d’Hudson, dont l’inaptitude à les bien administrer était devenue évidente. Peu après, il les réunit en une seule colonie, la Colombie britannique, et, soucieux de se créer une forte position dans le Pacifique du nord, il établit, sur la magnifique baie d’Esquimalt, auprès de Victoria, un arsenal, des hôpitaux et le siège de la division navale qui croise dans ces parages.