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celui-ci. Il fera, s’il y a lieu, les réserves nécessaires pour conserver les privilèges de l’église gallicane ; mais puisque le pape, au lieu de ratifier purement et simplement le décret du concile, a fait un bref comme il a voulu, il me semble que je dois y ajouter ce qui me convient[1]. Aussi je publierai un décret rendu en conseil d’état où sera rapporté mot pour mot le décret du concile, décret dans lequel on ne fera pas mention qu’il doit être soumis au pape… Il est convenable que vous m’écriviez sur ce projet. Surtout il faut le tenir secret et gagner du temps jusqu’à mon arrivée… J’attends que le pape fasse des démarches ultérieures. Vous pourriez cependant montrer le bref à la commission après lui avoir fait jurer le secret, afin qu’elle puisse faire des recherches et préparer le travail[2]… »

Le 6 octobre suivant l’empereur n’avait rien changé dans ses desseins. « Vous avez bien fait, écrit-il derechef à M. Bigot, d’exiger que tous les évêques, même ceux qui n’avaient pas de bulles, rentrassent dans leurs diocèses et que personne ne restât à Paris. N’y souffrez la présence d’aucun d’eux. Renvoyez également mes aumôniers… Envoyez-moi les lettres à signer pour les différens sièges vacans, afin de voir si le pape veut ou non donner l’institution à mes évêques. Faites connaître aux députés que je ne répondrai à aucune lettre, que je ne prendrai aucune décision que lorsque mes évêques auront leurs bulles. Je suis trop vieux et trop accoutumé aux ruses italiennes pour me laisser duper par eux. Les évêques doivent insister là-dessus avec la plus grande force. Je ne recevrai même pas la députation, si elle ne rapporte les bulles d’institution de tous mes évêques. Je n’enverra le bref au conseil d’état que lorsque tous l’es diocèses vacans auront leurs bulles. Il faut que la députation des évêques vous envoie un procès-verbal constatant qu’ils ont notifié au pape que le décret s’applique à tous les évêchés de l’empire, dont les états romains font partie[3]. » Le 26 octobre, c’était un nouveau message, non moins impératif, daté de Rotterdam et mêlé de quelques reproches adressés à son ministre des cultes. « Je vous ai prescrit de faire partir pour leurs diocèses tous les évêques indistinctement ; je vois cependant que plusieurs sont encore à Paris, entre autre l’évêque de Saint-Flour, auquel vous avez même dit que

  1. Nos lecteurs ne doivent pas oublier que cette assertion n’est pas du tout fondée : Le bref avait été préalablement communiqué aux envoyés de l’empereur, qui avaient fait contre la rédaction primitive plusieurs objections dont le pape avait tenu compte, et les prélats, chargés des pouvoirs de l’empereur, l’avaient en définitive complètement accepté.
  2. Lettre de l’empereur au comte Bigot de Préameneu, Anvers, 30 septembre 1811. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XXII, p. 494.
  3. Lettre de l’empereur au comte Bigot de Préameneu, Gorcum, 6 octobre 1811. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XXII, p. 501.