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rapportaient à des expressions dont le sens était peut-être un peu ambigu. A son avis, le plus fort était fait. « Dans le moment même où je vous écris, l’évêque de Trêves est occupé à chambrer l’archevêque d’Édesse, qui lui-même est parfaitement disposé. Ce soir, nous verrons les cardinaux de Bayanne et Roverella, qui sont les deux chevilles ouvrières[1]. »

Les changemens que M. de Barral et ses collègues désiraient introduire dans la rédaction du bref, quoique peu nombreux et sans grave importance quant au fond des choses, n’étaient pas toutefois sans signification. Pie VII ne voulut ni les accepter ni les rejeter complètement. Il en admit quelques-uns et repoussa les autres. On tomba vite et aisément d’accord. « Le pape nous a dit à ce sujet, écrit M. de Bayanne, qu’il ne voulait pas se damner, quoi qu’il en coûte, mais qu’il n’était rien qu’il ne fît pour l’empereur quand sa conscience n’aurait rien à lui reprocher. Cependant, même avec de bonnes raisons, il n’est pas toujours facile de calmer cette conscience si timorée[2]. » Comme il était aisé de le prévoir, le trouble moral que lui avaient causé tant d’épineuses résolutions à prendre avait agi de nouveau sur les nerfs de Pie VII. « Sa santé, sans être tout à fait mauvaise, écrivait M. de Barral le 15 septembre, n’est pas non plus fort bonne. Il dort peu, quelquefois point du tout. Plus le terme qui doit mettre fin à ses délibérations approche, plus il est agité au moral, et, comme de raison, le physique s’en ressent[3]. »

Trois jours après, le 18 septembre 1811, les hésitations du pape avaient pris fin. Lorsque l’évêque de Plaisance se rendit chez lui ce jour-là, d’assez bon matin, il le trouva mettant la dernière main aux corrections demandées par les prélats français. Pie VII engagea la conversation sur le bref, et fit valoir le désir qu’il avait toujours montré de pacifier les affaires de l’église. L’évêque de Plaisance répondit que ses collègues avaient surtout remarqué avec un extrême plaisir la manière pleine d’affection dont il avait parlé de sa majesté dans le bref, et qu’on voyait facilement qu’il était toujours père. « Alors, en riant d’une manière vraiment aimable, le saint-père m’a dit en parlant de sa majesté : Le fils est un peu mutin, mais toujours fils[4]. » Le surlendemain 20 septembre, les prélats envoyés à Savone étaient en mesure d’informer le cardinal Fesch qu’ils venaient d’obtenir de sa sainteté l’approbation sans aucune réserve et la confirmation pure et simple du décret du concile qu’ils avaient été chargés de lui présenter. « Cette approbation

  1. Lettre de M. de Barral à M. Bigot de Préameneu, 12 septembre 1811.
  2. Le cardinal de Bayanne au ministre des cultes, 13 septembre 1811.
  3. L’archevêque de Tours au ministre des cultes, 15 septembre 1811.
  4. Lettre de l’évêque de Plaisance à M. Bigot de Préameneu, 18 septembre 1811.