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trouvé la véritable. Ils ont préféré le cimetière de Calliste, parce qu’il était le premier dont l’état eût assuré la possession aux fidèles : ils voulaient reposer au sein de cette terre qui leur appartenait et dans les domaines de l’église.

Toutes ces explications paraissent si ingénieuses, elles frappent d’abord par un si grand air de vraisemblance, elles sont appuyées de tant de preuves, qu’il est difficile de ne pas les accepter. Il est vrai qu’elles ont l’inconvénient d’être nouvelles : c’est un tort que bien des gens ne pardonnent pas. A Rome surtout, où l’immobilité est à la fois un besoin physique et un dogme religieux, on regarde souvent comme un crime de changer la moindre chose aux opinions anciennes. Aussi les idées de M. de Rossi n’y étaient-elles pas bien accueillies de tout le monde. Les incrédules, dit-on, ne manquaient pas, même parmi la commission d’archéologie sacrée. Il fallait, pour les réduire au silence, une de ces découvertes qui ne laissent pas de place au doute et qui ouvrent les yeux aux plus obstinés. M. de Rossi eut le bonheur de la faire au moment où il en avait le plus besoin. Il retrouva la crypte où les papes du IIIe siècle, depuis Zéphyrin jusqu’à Miltiade, avaient été ensevelis. C’est une chambre d’assez médiocre étendue et que rien ne désignait à l’attention des explorateurs. Elle était pleine jusqu’au comble de matériaux entassés, quand on se mit par hasard à la déblayer. Les parties les plus élevées, par lesquelles on commença le travail, avaient été les plus maltraitées, et il ne fut d’abord possible de rien reconnaître; mais quand on approcha du sol, on s’aperçut bien qu’on était tombé sur une des chambres les plus importantes du cimetière. Les murs avaient été décorés avec une magnificence extraordinaire. Des restaurations successives les avaient couverts de riches peintures, puis de revêtemens de marbres. Parmi les ruines, on trouvait des chapiteaux et des fûts de colonnes, des pilastres brisés, des débris de sculpture. Il n’y avait pas moyen de douter que la crypte n’eût contenu les restes de personnages illustres; mais pouvait-on avoir quelque espérance de retrouver leurs noms? M. de Rossi l’essaya. Des fragmens d’inscriptions en pièces qu’il avait d’abord négligés parce qu’il lui semblait impossible d’en rien tirer furent de nouveau réunis, et cette fois, en les rassemblant, il parvint à lire les noms

droite du Tibre, les chrétiens, qui craignaient ce voisinage impur, avaient enlevé le corps de saint Pierre du Vatican, et qu’ils l’avaient apporté dans le cimetière de la voie Appienne. Il était donc naturel de penser que les papes, pour ne pas se séparer de leur illustre prédécesseur, avaient voulu depuis ce moment y être ensevelis; mais il est démontré aujourd’hui que le corps de saint Pierre fut déposé dans le cimetière de Saint-Sébastien, et non dans celui de Calliste. D’ailleurs au moment où cette translation eut lieu, Zéphyrin était déjà mort et reposait loin du Vatican.