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2 pour 100, pour le mettre en harmonie avec le nouveau système. Ils n’ont pour cela qu’un moyen, c’est de le refondre ainsi que les aigles et les demi-aigles, et d’y ajouter le penny qui leur manque. Or c’est une grosse affaire, et les Anglais qui se montrent si susceptibles pour l’intégrité de leurs contrats, lorsqu’on leur parle d’enlever quelques centimes à la valeur de leur livre sterling, n’ont pas l’air de se douter du trouble qu’ils apporteraient sous ce. rapport en Amérique, et cela pour une unité partielle, pour l’unité de la race anglo-saxonne.

Ce que les Anglais proposent n’est pas non plus très facile à réaliser pour eux-mêmes. On ajoutera 10 deniers à la livre sterling, et on la fera reposer sur 1,000 farthings au lieu de 960, afin qu’elle ait des divisions décimales; mais ces 10 deniers entraînent une refonte complète du système monétaire. D’abord c’est la livre sterling qui disparaît, cette ancienne livre sterling si connue, et qui règle à elle seule, dit-on avec fierté, plus de transactions que toutes les autres monnaies du monde; puis que deviendra le shilling? à quoi répondra-t-il? Il ne sera plus, comme aujourd’hui, la 20e partie de la livre, il en sera la 20e partie et 10/12e, c’est-à-dire qu’il n’aura plus aucun rapport avec elle. Le penny et le farthing restent seuls. Sans doute, pour parer à ces inconvéniens, qui sont considérables, on a imaginé de faire de la nouvelle monnaie une unité de compte qui n’entrerait pas dans la circulation, qu’il ne serait pas nécessaire de frapper, et qu’on exprimerait par des équivalons. On écrirait 1 livre sterling shilling 10 deniers toutes les fois qu’on voudrait l’exprimer, et les choses resteraient comme elles sont. On continuerait à avoir des livres sterling et des shillings pour les monnaies usuelles, et chacun posséderait une table de conversion pour l’unité internationale. Ce plan n’est assurément pas très praticable. Quoi! on suppose une monnaie de compte purement conventionnelle qui n’aurait aucune représentation effective! Il n’y aurait pas de pièce de 1 livre sterling 0 shilling 10 deniers! Si cela est possible, il est inutile d’agiter les peuples et de leur demander de créer un même type monétaire en modifiant un peu le leur. On n’a qu’à leur proposer une unité de convention que chacun sera libre d’exprimer en sa propre monnaie. Si cette unité est de 50 francs par exemple, les Anglais l’exprimeront par 1 livre sterling 19 shillings 8 pence, les Américains par 9 dollars 49 cents ou 9 dollars 1/2, les Russes par 12 roubles 1/2, les Prussiens par 13 thalers 16 gros, les Allemands du sud par 25 florins. On pourrait bien en effet s’entendre ainsi pour les statistiques, les comptes budgétaires et même les valeurs commerciales; mais on serait loin d’avoir résolu toutes les difficultés que présente la situation actuelle. On n’aurait toujours