Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 80.djvu/389

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gramme ne simplifie rien, il se présente au contraire comme une complication de plus; enfin lui-même n’est pas complètement décimal. Ainsi on ne pourrait pas fabriquer des monnaies de l’unité adoptée, c’est-à-dire du gramme; on en fabriquerait encore moins d’un décigramme et d’un centigramme, et quant aux monnaies divisionnaires d’argent, il n’y en a point qui soient en poids rond la 10e partie de la monnaie d’or. La valeur du décigramme d’or est représentée par un poids d’argent de 1 gramme 55 centigrammes.

On dit que ce système est le plus logique. D’abord on se demande ce que signifie la logique quand il s’agit de sciences sociales, qui s’appliquent à ce qu’il y a de plus relatif, qui doivent tenir compte des goûts, des habitudes et des traditions. Et puis quelle est cette logique qui fait rétrograder la civilisation? La monnaie de poids est celle des sociétés primitives, celle qu’on a lorsqu’on est obligé de faire la vérification par soi-même, et qu’il n’y a pas de garantie dans le contrôle de l’état. Elle est encore en usage en Chine, où chacun a sa balance pour peser le lingot qu’il reçoit. A mesure qu’on avance en civilisation, la monnaie de poids disparaît pour faire place à la monnaie de convention, c’est-à-dire à une monnaie plus simple, dûment certifiée par l’état, et que tout le monde accepte sur la foi de cette garantie. Elle a sur l’autre l’avantage qu’a dans la langue la parole sur le signe. Le signe est peut-être plus expressif, mais il est moins rapide, et quand on s’entend avec la parole, l’autre moyen devient inutile. De même pour la monnaie de convention : quand on sait ce qu’elle vaut par rapport à telle ou telle marchandise, cela suffit. Du reste, il faut bien que l’idée du gramme ait paru d’une application difficile, car jusqu’à ce jour elle a rencontré peu d’adhérons, elle a été à peine indiquée dans la conférence de 1867, et n’a pas été soutenue du tout dans la dernière enquête anglaise.

Voyons maintenant un autre système, celui qui a été mis en avant dans cette conférence de 1867, réunie, comme chacun sait, avec un certain éclat sous la présidence du prince Napoléon et provoquée par M. de Parieu, qui a déjà eu le mérite d’attacher son nom à la première base de l’unité par la convention de 1865. Elle était composée des hommes les plus compétens de l’Europe délégués par tous les pays. On a dans cette conférence, qu’on me pardonne le mot, un peu battu les buissons. On s’abordait sans avoir rien préparé à l’avance, on craignait la résistance que soulèveraient les innovations trop radicales, et on a cherché une solution qui pût satisfaire tout le monde. On a proposé la pièce de 25 francs pour plaire à l’Angleterre, celle de 15 francs pour être agréable à l’Allemagne, on a parlé de la pièce de 10 francs, et enfin on s’est arrêté