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beaucoup trop petit et correspondrait à une valeur d’environ 3 fr., au moins de 5 et 10 grammes et même de 2 ; au-dessous, on conserverait la monnaie divisionnaire d’argent. On trouve aussi opportun dans ce système de pouvoir fabriquer des pièces d’argent d’un poids et d’un titre déterminés sans cours légal, de pouvoir certifier également des lingots du même métal, et de laisser chacun libre de stipuler dans les contrats avec lequel des deux métaux il entend être payé. De cette manière, l’on donne satisfaction à ceux qui prétendent qu’on ne peut pas rejeter absolument l’argent, qui a son rôle utile dans la circulation. De plus on a un système logique qui cadre avec l’ensemble de notre système décimal. On suppose qu’on n’aurait pas de peine à le faire accepter, et qu’on échangerait bien vite aussi facilement un hectolitre de blé contre 6 grammes 451 milligr. d’or qu’on l’échange aujourd’hui contre 20 francs. Ce système, mis en avant parmi ingénieur en chef des ponts et chaussées, M. Léon, a été particulièrement défendu par un économiste éminent qui a acquis une grande compétence en ces matières, et qui donne toujours aux idées qu’il patronne une grande autorité, M. Michel Chevalier. Il mérite donc d’être examiné sérieusement.

La première objection qu’il rencontre est assurément de celles auxquelles on ne s’attendait pas. On le présente comme un système de conciliation en présence de toutes les susceptibilités nationales qu’éveille le choix de la monnaie universelle. Les Anglais ne veulent pas de notre franc, nous ne voulons pas de leur souverain; les Américains proposeraient volontiers leur dollar, et les Allemands leur thaler. Comment s’entendre au milieu de ces prétentions diverses? L’unité de poids a paru tout concilier, parce qu’elle repose sur une base qui n’appartient à personne, ou plutôt qui appartient à tout le monde, et voilà qu’on répond de l’autre côté du détroit qu’il n’y a pas d’unité de poids et de mesure absolue s’imposant par elle-même, comme s’imposent, par exemple, l’or et l’argent pour servir de signe monétaire. Le mètre, qui est le point de départ de tout le système, est une mesure de convention. On a pris, pour l’établir, la quarante millionième partie du méridien terrestre passant par la France entre Dunkerque et Fermentera; mais le choix de cette unité est arbitraire. Les Anglais vous disent que leur yard, comme mesure de longueur, et leur livre troy subdivisée en grains, comme mesure de poids, sont aussi rationnels que notre mètre et notre gramme, et beaucoup plus usuels. Ils ajoutent que le gramme, ramené au système métrique parce qu’il est la centième partie d’un mètre cube d’eau distillée à la température de à degrés au-dessus de zéro, est non moins arbitraire. Nous ne voulons pas assurément nous faire l’écho des reproches adressés au système métrique, nous croyons