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1867 il atteignait 540,826 tonnes, non compris les gabarres et les bateaux de la Loire. Il y a vingt-cinq ans, l’arrivée d’un navire à voile de 500 tonneaux était un événement dans ces parages. C’est journellement qu’on en voit de 800, de 900, de 1,000, de 1,500, qui, sans les constructions de Saint-Nazaire, n’auraient jamais pu aborder le fleuve, au grand préjudice du commerce de Nantes. Dans ces actives évolutions, quelle est cependant la part de travail qui revient réellement à Saint-Nazaire, et dont profite le groupe maritime de la Basse-Loire ? Là-dessus, quelques explications deviennent indispensables.

La navigation à l’embouchure de la Loire se partage en trois branches : navigation de transbordement, navigation directe, ne concernant l’une et l’autre que les marchandises, et navigation des paquebots transatlantiques destinés aux voyageurs et à certaines catégories de produits. Or jusqu’à ce jour c’est surtout comme port de transbordement que Saint-Nazaire s’est développé. La plus grosse somme du tonnage annuel tient à ce mouvement-là. Les marchandises s’en vont à Nantes. Seulement, au lieu de décharger les navires, comme jadis, sur des gabarres, on les vide dans les wagons du chemin de fer; voilà toute la différence. Des grues d’une extrême puissance installées sur les quais facilitent singulièrement cette besogne. Les écritures de douane se font à Nantes, et les recettes figurent au compte de cette place. Ainsi s’explique l’apparente contradiction existant entre les arrivages et la quotité des droits perçus[1]. Étrange circonstance, les denrées coloniales consommées à Saint-Nazaire sont portées d’abord à Nantes, d’où elles reviennent ensuite au point de débarquement! Pendant quelques années après l’ouverture du bassin, certaines maisons de commerce poussaient la fiction plus loin encore. Dans la vaine hypothèse que les navires avaient touché le quai de la Fosse, elles ne voulaient payer la solde des marins qu’à Nantes, où les amenait le chemin de fer. En fait, la navigation de transbordement laisse très peu de travail à Saint-Nazaire. Grâce aux engins employés et au voisinage des rails, il en coûte moins de temps et de peine pour décharger aujourd’hui les navires du plus fort tonnage qu’autrefois les moindres barques.

Quant au commerce direct, il est encore fort mince. Il embrasse surtout les houilles venant de Cardiff et les bois de l’Europe septentrionale. En 1867, les houilles figurent au commerce général pour une valeur de 3 millions de francs et les bois pour 2 mil-

  1. En 1867, les droits payés à Saint-Nazaire montent seulement à 228,875 francs, tandis qu’à Nantes ils dépassent le chiffre de 19 millions de francs.