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pement de 1,500 mètres. La profondeur, qui est au minimum de mètres, va jusqu’à 7 mètres 50 centimètres à pleine mer des plus faibles marées. Il n’était pas nécessaire de ménager un avant-port comme il en existe ailleurs, au Havre par exemple; la petite rade forme elle-même une sorte d’avant-port à flot.

Depuis l’achèvement de cette construction gigantesque, qui fait honneur aux ingénieurs chargés d’en rédiger les projets et d’en assurer l’exécution, il s’est élevé une objection assez spécieuse ayant trait à l’envasement du port. Il est vrai que les abords du bassin et le bassin lui-même reçoivent chaque jour une certaine quantité de vase dont il importe de se débarrasser avant qu’elle se soit tassée et consolidée; mais souvent on est tombé à ce sujet dans une confusion manifeste. On a parlé de la vase comme s’il s’était agi de sable. Le sable, qui se précipite au fond, aurait bien vite rendu impossibles les manœuvres des portes d’une écluse; mais la vase, qui reste en suspension dans l’eau, est au contraire facile à maîtriser. A Saint-Nazaire, on a attaqué ce problème de front, et le triomphe de la science a été complet; il y a là un des côtés les plus curieux du système constitutif de ce port.

Les deux marées font passer chaque jour en moyenne dans la rade de 40 à 42 millions de mètres cubes d’eau. Cette eau contient environ un septième de vase, soit 6 millions de mètres cubes. Le bassin et les abords en reçoivent environ 880 mètres par jour. Relativement c’est peu ; mais c’est beaucoup trop pour qu’il soit possible de s’en débarrasser, comme on avait espéré le faire d’abord, avec des écluses de chasse. On a donc imaginé un genre de bateau muni d’une machine aspirante dont l’extrémité pénètre jusqu’au fond de l’eau, et y pompe la vase; on enlève ensuite cette dernière au moyen d’une chaîne sans fin munie de godets qui la déversent dans un bateau plat divisé en compartimens indépendans les uns des autres. Jusque-là, l’opération est des plus simples; mais que faire de cette triste moisson quotidienne ? Ici s’arrêtent les calculs de la science pour faire place aux expédions de la pratique, tels que les circonstances locales ont semblé les imposer. Une fois remplis, les bateaux gagnent le large, et à 1 kilomètre ou 1 kilomètre 1/2 de distance, à l’aide d’une soupape dont chaque compartiment est muni, ils rendent leur charge à la mer. Or la mer la rapportera le lendemain.

Avant de se récrier contre cet échange, qui ne finit pas plus que la fameuse tapisserie de Pénélope, les auteurs du système demandent fort sensément qu’on leur indique un autre mode de procéder. N’oublions pas, ajoutent-ils, qu’il s’agit seulement de 880 mètres sur 6 millions. De plus, la tâche ingrate à laquelle on se condamne, on sait du moins ce qu’elle coûte. Les frais d’entre-