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l’église, trop de complaisance pour celui dont le sort en dépendait à leurs yeux, tels ont été les torts principaux des membres du concile qui, dans la querelle survenue entre le saint-siège et le gouvernement français, se proposèrent surtout de marcher toujours d’accord avec le fondateur de la dynastie impériale. Qu’à ces sentimens, sincères chez la très grande majorité, il se soit mêlé d’autres considérations moins avouables, il n’est pas interdit de le supposer ; les prêtres n’échappent pas plus que le reste des mortels aux défaillances de l’espèce humaine, et jamais elles ne furent peut-être plus tristement fréquentes qu’à cette époque de notre histoire. Des motifs honteux ne paraissent pas néanmoins avoir influé d’une façon directe sur la conduite des prélats qui servirent alors d’instrumens aux projets du chef de l’empire, et Dieu sait pourtant si les tentations leur furent épargnées ! Engagé à fond dans une lutte où sa puissance et son orgueil étaient également en jeu, Napoléon n’était pas homme à laisser sans stimulant ou sans récompense les secours qu’il attendait d’auxiliaires aussi utiles que l’étaient par exemple MM. de Barral et Duvoisin. Par prudence, si l’on veut, par honneur, nous préférons le croire, ses offres compromettantes ne furent jamais acceptées. Il résulte en particulier de renseignemens que nous croyons puisés à bonne source que l’évêque de Nantes, le conseiller le plus écouté de l’empereur, eut maintes fois à se défendre pendant la tenue du concile contre les propositions de son maître, attentif à faire miroiter tour à tour devant ses yeux le chapeau de cardinal, de grandes situations ecclésiastiques et des places lucratives pour tous les membres de sa famille. Plus jaloux de son influence personnelle sur les membres du clergé que de profits ou d’honneurs, M. Duvoisin demeura inébranlable. Il avait assez de fierté pour attacher moins d’importance aux faveurs de la cour qu’au succès des idées qu’il avait déjà défendues au sein de deux commissions ecclésiastiques, et qu’il espérait faire maintenant triompher dans le concile au moyen d’un plan de conduite dont il était le principal inventeur, et qui ne manquait, à vrai dire, ni de prudence ni d’habileté.

Il eût été impossible, et l’évêque de Nantes le sentait mieux que personne, d’apporter au concile national de 1811 des propositions contraires aux droits avérés du saint-siège. Lui demander de reconnaître au chef de l’empire le droit de nommer directement les évêques, c’eût été provoquer sans profit une explosion de mécontentemens. Averti par M. Duvoisin, l’empereur y avait renoncé. Ses prétentions avaient beaucoup baisser Il se bornait maintenant à vouloir obtenir du concile la déclaration que, si le pape continuait à demeurer inflexibles le concile se reconnaîtrait compétent pour aviser