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bourgeons avortés et se développant à l’ombre qu’on désigne sous le nom impropre de choux-fleurs.

Au point de vue de la richesse nutritive, les champignons seraient donc des alimens très recommandables. Malheureusement plusieurs espèces comestibles ont pour voisines des espèces vénéneuses, et présentent avec celles-ci des analogies telles qu’au retour de chaque saison les conseils d’hygiène et de salubrité recommandent de s’abstenir des champignons trouvés dans les prés ou les bois, conseils peu suivis du reste, bien que des accidens trop fréquens et fort graves dussent rappeler les consommateurs à la prudence. Une chose à remarquer dans ces empoisonnemens, qui mettent en danger tous les membres d’une même famille après le repas commun, c’est que l’on parvient d’ordinaire à sauver quelques-uns des convives, ceux qui ont mangé le moins de cet aliment douteux. Ce n’est généralement en effet que pris en assez grande quantité que les champignons sont un poison mortel. On ne connaît guère que cinq espèces qui tuent à petite dose[1].

Il existe cependant un champignon comestible dont l’aspect ne rappelle celui d’aucune espèce vénéneuse, et qui présente à ce titre une grande sécurité, c’est la morille (Morchella esculenta). Elle se développe spontanément au milieu des forêts, soit dans les clairières, soit sur les points où l’on a formé des meules de charbon de bois ou des tas de ce combustible. C’est un champignon de forme délicate et d’un brun orangé. Le dessus présente une sorte ide chapeau ovoïde, le dessous est sillonné de nombreuses nervures adhérentes qui dessinent des cavités profondes et irrégulières. Les morilles exhalent un parfum léger, mais très agréable, et le communiquent aux alimens. Elles-mêmes forment un mets nourrissant et agréable, elles présentent de plus cet avantage qu’il est très facile de les conserver. Il suffit de les faire sécher et de les maintenir à l’abri de l’humidité pour pouvoir les garder presque indéfiniment. Au moment d’en faire usage, on les plonge dans l’eau tiède ; elles reprennent leur volume primitif, l’apparence et la plupart des qualités des morilles fraîches.

Les champignons découche (Agaricus edulis) sont devenus dans les villes, à Paris surtout, l’objet d’un grand commerce. Au point où ils sont d’ordinaire quand on les consomme, c’est-à-dire

  1. L’Agaricus necator, agaric meurtrier, qui vient dans les forêts, ; il se distingue des gros agarics inoffensifs par son chapeau rougeâtre. — L’Amonita venenosa, oronge ciguë, qui se trouve dans les bois ombragés ? on en connaît trois variétés, blanche, jaune et verte ; toutes trois ont une odeur et une saveur désagréables. — L’Agaricus pectinatus, agaric émétique, qui est blanchâtre, rose ou jaune. — L’Agaricus sanguineus, qui est recouvert d’un chapeau franchement rouge. — Enfin le Boletus perniciosus, moins délétère que les précédens, mais encore très dangereux, qui est monté sur un long pédicule, et dont l’intérieur, naturellement jaunâtre, bleuit au contact de l’air.