Page:Revue des Deux Mondes - 1869 - tome 79.djvu/665

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

étaient contraires à l’opinion qu’il défendait en ce moment. Les débats devenaient de plus en plus irritans, la confusion même allait s’y mettre, car on retombait forcément dans les questions de doctrine déjà débattues et réglées, lorsque le cardinal Spina remit un peu de calme dans les esprits par une réflexion aussi sage que pratique. « S’appuyant sur le témoignage de tous les évêques d’Italie, qu’il somma de confirmer son dire, il rappela combien ils avaient tous eu de peine à calmer les fidèles de ce royaume au sujet de l’excommunication. Le concile avait eu mille fois raison de n’en vouloir point parler dans son adresse. a quoi servirait cependant cette sagesse, si, à propos d’une proposition incidente et douteuse en elle-même, on allait réveiller maintenant cette formidable question ? Tout serait de nouveau perdu ; on allait de gaîté de cœur rejeter les populations de l’Italie dans des troubles sans fin, si l’on publiait l’adresse avec le paragraphe qu’on discutait en ce moment. » C’était la raison même qui venait de parler par la bouche du cardinal Spina. Les membres de l’assemblée étaient d’ailleurs épuisés de fatigue. Ils décidèrent à la pluralité des voix qu’on bâtonnerait dans le projet d’adresse tout ce qui, de près ou de loin, avait trait à la bulle d’excommunication, et d’un commun accord la suite de la discussion fut remise au lendemain[1].


III

Lorsque les pères du concile se réunirent pour la seconde fois, le 27 juin, afin de continuer la discussion du projet d’adresse, ils pouvaient déjà connaître par leur président, le cardinal Fesch, et par l’évêque de Nantes, qui s’étaient rendus la veille au soir à Saint-Cloud, l’impression ressentie par l’empereur lorsqu’il avait appris ce qui s’était passé dans leur assemblée précédente. Son mécontentement avait d’abord été assez vif, mais il avait été peu à peu calmé par l’assurance que ces messieurs avaient pris sur eux de lui donner que rien n’était encore perdu, et que, somme toute, les choses marcheraient probablement assez bien. De colère contre les personnes, il n’en avait témoigné aucune, soit qu’il n’en ressentît point, soit que, plus maître de lui-même, il jugeât convenable de se montrer patient aussi longtemps qu’aucune résolution définitive n’aurait été prise par le concile. Il y a mieux : quelques complaisans de son entourage s’étant avisés, croyant sans doute faire leur

  1. Journal de M. de Broglie, évêque de Gand. — Lettre de M. Castelli, insérée dans les mémoires de l’abbé Baraldi, t. XII.