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avis. L’empereur toutefois ne l’entendait pas ainsi. Mécontent de la manière dont les choses avaient jusqu’à présent tourné, plus impatient que raisonnable, comme toujours démesurément pressé d’en venir à ses fins, Napoléon, au lieu de laisser aux esprits le temps de se calmer, au lieu de permettre à cette commission, la première nommée par le concile, de se renfermer dans la facile mission qui lui était tout naturellement assignée, avait résolu de la compromettre à fond dans sa propre cause, en lui faisant tout d’abord professer in extenso et sans réticence l’ensemble des thèses qu’il s’efforçait, depuis plusieurs années déjà, d’opposer aux doctrines de la cour de Rome. Dans cette occasion, l’habile M. Duvoisin, évêque de Nantes, fut, comme on pouvait s’y attendre, l’instrument choisi par Napoléon pour mener à bien un dessein qui ne tarda guère à devenir évident pour tous les membres de la commission de l’adresse.


II

Le vendredi 21 juin, les membres de cette commission étaient assemblés chez le cardinal Fesch. Ils étaient au nombre de sept, non compris le président. C’étaient les archevêques de Ravenne, de Turin et de Tours, les évêques de Nantes, de Troyes, de Gand et de Montpellier ou d’Évreux[1]. Presque à l’ouverture de la séance, M. Duvoisin, évêque de Nantes, tira de sa poche et lut un projet d’adresse qu’il avait rédigé d’avance. Comme la réputation de ce

  1. Le scrupule que nous désirons apporter dans les moindres détails de cette étude nous oblige à convenir que nous ne pouvons pas nous porter garans de la parfaite exactitude des listes que nous donnons des membres qui ont composé les différentes commissions du concile, non plus que de la date précise des jours où les différentes congrégations générales ont eu lieu. Les documens particuliers et confidentiels sur lesquels nous travaillons, et qui remontent la plupart à l’époque même du concile, sont, comme il arrive fréquemment, fort vagues au sujet de certains faits positifs qui étaient parfaitement connus des contemporains, et qui dans le moment leur semblaient tout à fait insignifians. Sur les deux points que nous venons de signaler, la composition des commissions particulières et la date des réunions des assemblées générales du concile, les auteurs de quelque autorité, M. Jauffret, M. Picot, le chanoine de Smet, varient un peu. Les actes officiels et les procès-verbaux du concile de 1811, d’ailleurs très brefs, tronqués même, n’ont jamais été publiés intégralement par le gouvernement impérial. Ces papiers sont contenus dans deux cartons assez volumineux conservés aux archives impériales, et que tout le monde peut y consulter ; mais, ainsi que nous l’avons déjà expliqué à nos lecteurs, M. le maréchal Vaillant, ministre de la maison de l’empereur, contrairement aux facilités qui nous ont été accordées presque partout ailleurs, nous ayant de vive voix annoncé qu’il avait donné les ordres les plus formels pour que rien ne nous fût communiqué dans cet établissement public, il n’a pas dépendu de nous de vérifier ces détails, qui ne changent d’ailleurs rien au fond des choses, sur lesquelles nous croyons posséder tous les renseignemens vraiment précieux.