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Madame Valery.

Je n’en dirai pas autant du vôtre, qui n’en est pas un, je puis vous l’affirmer.

Madame de Queyrel.

Le détour est habile, et vous vous entendez à désarmer les gens. Je ne vous aurais pas cru, jeune comme vous l’êtes, autant d’adresse et de sang-froid. Mon mari n’est point un saint, dites-vous ; mais il n’en affecte pas les allures, grâce à Dieu, et, loin de m’étonner, vous me ravissez, ma chère.

Madame Valery.

Votre ravissement n’est que l’écho du mien. Je ne puis m’empêcher de rire à l’idée des légèretés que mon mari a dû vous débiter.

Madame de Queyrel.

Vous êtes d’humeur accommodante, mais, en face de certains… badinages, j’ai moins de philosophie que vous n’en prouvez, et, si je savais que mon mari vous a baisé la main en se jetant à vos pieds,… j’en serais émue, je ne le cache pas.

Madame Valery.

Soyez donc émue tout à votre aise, car M. de Queyrel a précisément fait la chose que vous dites.

Madame de Queyrel.

C’est impossible ! J’exige que vous vous expliquiez. Où cela ?… Quand ?

Madame Valery.

Ici même, à l’instant. Et vous prétendez toujours que mon mari…

Madame de Queyrel.

M’a manqué de respect d’une façon identique, il n’y a pas dix minutes, là-bas, en traversant le bosquet.

Madame Valery.

Vous vous moquez apparemment ? Ah ! ah ! ah !

Madame de Queyrel.

Ce que vous dites, ma chère, n’a pas le sens commun ! Ah ! ah ! ah ! (Toutes deux presque en même temps se détournent et s’essuient rapidement les yeux. — Silence.)

Madame Valery, se rapprochant tout à coup de madame de Queyrel.

Tout cela est indigne, oui, madame, indigne !

Madame de Queyrel.

J’allais précisément vous le dire. (Elles vont s’asseoir l’une à gauche, l’autre à droite de la scène, fort émues et s’essuyant les yeux.)



Scène X.

Les Mêmes, MONSIEUR DAVOY, se frottant les mains.
Monsieur Davoy, très gaiment.

Ah ! grand Dieu, mesdames, qu’il fait chaud !