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lions et grever la dette fondée de 130 millions de rentes. Malgré ces émissions successives, le cours des fonds publics dépassait le pair. Les comptes des trois premières années s’étaient réglés en déficit à cause des charges extraordinaires de l’occupation. En revanche, les cinq années suivantes présentaient toutes des excédans de recettes. Le produit annuel des impôts indirects avait augmenté de 78 millions par le seul développement de la richesse publique; cette progression avait permis d’opérer sur la contribution foncière un dégrèvement de 28 millions; les trois ministères de la guerre, de la marine et de l’intérieur avaient reçu des supplémens de dotation, l’amortissement avait racheté pour 34 millions de rentes. « La situation financière, dit M. Calmon, était à tous égards excellente, et cette situation, la France la devait incontestablement aux institutions dont elle était douée, institutions qui, en associant à la direction de leurs affaires et à l’administration de leurs intérêts les pays qui en jouissent, ne permettent pas les écarts et les dépenses inutiles auxquelles les pouvoirs sans contrôle sont trop souvent enclins à se livrer. »

Les sept dernières années de la restauration feront l’objet du second volume, M. Calmon a fait preuve d’un rare esprit d’impartialité en même temps que d’une connaissance approfondie des questions financières; on ne peut lui reprocher que de n’avoir pas fait une part assez large à la critique. Il n’y a guère qu’à louer dans l’administration financière de la restauration jusqu’en 1822. On ne peut pas en dire tout à fait autant depuis cette époque. Si bonne que fût la situation à la fin de 1823, elle aurait pu être meilleure. Sans la guerre d’Espagne, on aurait pu réduire encore les impôts et notamment en supprimer deux qui déshonoraient nos finances : la loterie, qui rapportait 15 millions, et la ferme des jeux, qui en rapportait 5. C’était le projet du baron Louis, et ce fut un des premiers actes du gouvernement sorti de la révolution de 1830. On peut faire une critique plus grave encore. L’amortissement avait racheté pour 34 millions de rentes; mais en même temps on avait émis de nouveaux emprunts, et il eût mieux valu ne pas émettre de rentes nouvelles que de racheter les anciennes. C’était encore l’opinion du baron Louis, qui combattit les nouvelles émissions. L’amortissement est un excellent instrument, mais à la condition, hors des cas très rares, qu’on n’emprunte pas pour amortir. Tout n’était pas faux dans les attaques de l’opposition contre ce système, et, s’il se mêlait beaucoup d’illusions aux déclamations des journaux sur le progrès de la dette publique, il s’y trouvait un fonds de vérité.

Il peut paraître exagéré de trouver à redire sur un budget de 900 millions, quand le nôtre dépasse aujourd’hui 2 milliards; mais l’administration de la restauration, la plus économe que nous ayons eue, aurait pu être plus économe encore. La liste civile était excessive (32 millions), et, quand la monarchie de 1830 la réduisit à 12 millions, elle rentra