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était avant la révolution de 1848 maître des requêtes au conseil d’état et député. Il appartenait, comme son père, à cette catégorie des fonctionnaires députés qui a probablement disparu sans retour dans la catastrophe de février. L’histoire dira si, en excluant les fonctionnaires de la chambre élective, on en a exclu l’esprit de dépendance et de soumission au pouvoir; elle dira si les fonctionnaires députés ne formaient pas un des groupes les plus éclairés et les plus libres, car il s’en trouvait en aussi grand nombre dans l’opposition que dans la majorité. Surpris comme tant d’autres par le 24 février au moment où s’ouvrait devant lui une double carrière administrative et politique, M. Calmon a subi sans se plaindre la loi des événemens. Il a cherché une diversion dans l’étude, et, comme l’y préparait son éducation première, il a tourné principalement ses recherches vers l’histoire financière de la France et de l’Angleterre. Il a été ainsi amené à écrire une Histoire des finances françaises sous la restauration dont le premier volume vient de paraître. La restauration a fourni de nos jours le sujet de travaux historiques excellens ; mais la partie des finances méritait d’être traitée à part, car de tous les gouvernemens qui se sont succédé depuis soixante ans, c’est celui qui a eu la meilleure administration financière. « Au milieu des charges si lourdes, dit M. Calmon, auxquelles ce gouvernement a eu à subvenir, les ministres ont constamment pris à tâche de maintenir l’équilibre le plus rigoureux dans les budgets, et lorsque parfois les recettes ont été supérieures aux dépenses, les excédans, au lieu d’être employés par avance, ont toujours été mis en réserve et reportés aux exercices suivans. C’est qu’en effet de leur côté les chambres, aussi bien la chambre introuvable de 1816 et celle de 1824 que la chambre libérale de 1818 et 1819, n’ont cessé de maintenir avec énergie leur droit d’examen, de vote et de contrôle des dépenses et des recettes publiques, et c’est ainsi que par le concours d’un pouvoir exécutif animé des intentions les plus droites et d’un pouvoir législatif exerçant avec indépendance et autorité ses attributions constitutionnelles ont été fondés un budget et un système de finances qui resteront un des grands bienfaits du régime parlementaire. »

Le livre débute par un coup d’œil rapide sur les finances de la révolution et de l’empire. Le tableau des finances de la révolution est lamentable. L’ancienne monarchie avait environ 600 millions de revenus. Au lieu de conserver les impôts existans en les améliorant par degré, la révolution voulut faire, là comme partout, table rase. Elle commença par supprimer toutes les contributions indirectes, à l’exception des douanes, ce qui est un système financier comme un autre et même meilleur qu’un autre, mais ce qui n’est possible qu’en temps calme et régulier, quand on peut faire l’opération peu à peu, en ménageant la transition. Dans l’affreux désordre de ces dix terribles années, les impôts conservés ne rapportèrent que 300 millions par an, et comme on augmen-