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située du côté de Richmond et composée de prairies et de bois, resta séparée. George III y avait construit un observatoire astronomique transformé maintenant en un institut météorologique placé sous la direction de l’Association britannique[1] ; mais 20 hectares sont consacrés à la botanique, et 110 sont couverts d’arbres magnifiques entrecoupés de prairies formant une délicieuse promenade le long de la Tamise. En 1841, sir John Hooker, connu par ses nombreux travaux botaniques, fut placé à la tête de l’établissement.


III

Les jardins de Kew sont ouverts tous les jours, le dimanche compris, à partir de midi ; le public peut circuler partout, dans les orangeries, dans les serres, dans les musées botaniques ; les surveillans sont peu nombreux, et, il faut le dire à l’honneur des Anglais, il est fort rare qu’une fleur ou un fruit soit cueilli par une main indiscrète. Cependant l’affluence est énorme : en 1867, on a compté en tout 494,909 visiteurs dont 277,717 sont venus dans la semaine et 217,192 le dimanche. La description que nous allons donner des beautés et des richesses de cette capitale de la botanique expliquera cet empressement. Quand on entre dans le jardin, une orangerie nommée Grecian conservatory se présente à droite ; elle est consacrée spécialement aux plantes de la famille des aroïdées, dont les vulgaires gouets ou pieds-de-veau de nos haies sont les modestes représentans européens. Dans les pays chauds, ces plantes prennent un développement énorme, leurs larges feuilles découpées et trouées de la manière la plus bizarre garnissent des tiges souvent grimpantes ; de nombreuses racines aériennes descendent des branches vers le sol, où elles s’enfoncent. Toute la plante donne une idée de la végétation luxuriante de l’Amérique et de l’Inde tropicales. Pendant la nuit, les feuilles sécrètent des gouttelettes d’eau, et les fleurs forment un long épi enfermé dans une feuille roulée qui prend le nom de spathe. A l’époque de la fécondation, la température de l’intérieur de la spathe s’élève quelquefois à 10 degrés au-dessus de celle de l’air. Plusieurs espèces sont utiles, par exemple la colocase des anciens, cultivée en Égypte et en Syrie, et dont la souche féculente est la principale nourriture des fellahs, le chou caraïbe, qui est très répandu dans l’Amérique méridionale et les Antilles, le Monstera deliciosa, dont l’axe floral est pulpeux et d’un goût agréable.. De beaux palmiers s’élèvent au centre de la. serre ; l’un d’eux, le Phytelephas macrocarpa, fournit l’ivoire

  1. Voyez la Revue du 1er janvier 1868.