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ordonnèrent la création d’un Jardin royal de plantes médicinales. La mort d’Hérouard et l’indifférence habituelle des gens en place pour ce genre d’établissemens retardèrent jusqu’en 1638 l’acquisition des terrains nécessaires, qui appartenaient aux religieux de Sainte-Geneviève. En 1635, La Brosse fut nommé intendant du Jardin royal, et trois professeurs y firent des cours sur les plantes et sur les préparations pharmaceutiques qu’elles peuvent fournir. L’opposition de la faculté de médecine de Paris contre La Brosse, qui n’était pas sorti de son sein, fut heureusement sans effet ; le nouvel intendant prit possession de son emploi, et déjà en 1636 il réunissait dans le jardin plus de 1,800 espèces, nombre qui s’élevait en 1640 à 2,360, et en 1665 à 4,000. Guy de La Brosse mourut peu d’années après son installation ; mais quelques-uns de ses successeurs, Vallot, Fagon, Tournefort, Vaillant, Antoine de Jussieu, jetèrent un grand éclat sur l’enseignement du Jardin royal, et contribuèrent à enrichir les collections et à multiplier le nombre des plantes vivantes.

L’Angleterre entra tard dans la lice ; nous verrons plus loin comment elle a regagné le temps perdu. Son premier jardin botanique, celui d’Oxford, date de 1640 ; en Suède, celui d’Upsal, illustré depuis par Linné, existait déjà en 1657. La fondation d’établissemens semblables dans la péninsule ibérique remonte à 1753 pour Madrid et 1773 pour l’université de Coïmbre. Depuis cette époque, les établissemens botaniques se sont multipliés dans tous les pays. Des princes ou de riches particuliers créaient également des jardins où ils se plaisaient à réunir des végétaux exotiques. Il serait trop long de les énumérer tous, mais il y aurait injustice de ne pas rappeler ceux que les botanistes contemporains ont illustrés par leurs travaux. Musa Brassavolus a fait connaître les richesses réunies dans le jardin du Belvédère, créé à Ferrare par le duc Alphonse II, le protecteur, puis le persécuteur du Tasse. A Milan, le jardin de Scipion Simonetta a été décrit par le Targio ; à Rome, Aldini figura les plantes de celui du cardinal Odoard Farnèse dans un livre qui porte la date de 1625. En France, nous citerons les jardins de René Du Bellay, qui avait envoyé en Orient Pierre Belon, et ceux de Gaston d’Orléans, contemporains de la fondation du Muséum d’histoire naturelle de Paris. Amateur éclairé d’horticulture, ce prince avait eu l’heureuse idée de faire peindre sur vélin les végétaux qui fleurissaient dans ses parterres par un artiste célèbre de l’époque appelé Robert. Ces dessins, acquis par Colbert au nom du roi après la mort de Gaston, en 1660, sont l’origine de la collection des vélins du Muséum, qui s’est continuée depuis sans interruption et se poursuit encore de nos jours. A la fin du xvii0 siècle, les jardins botaniques particuliers