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déclaration de guerre, ils devaient, sous peine d’encourir une exécution militaire, revenir sur ce vote, ramener leurs armées sur le pied de paix, adhérer enfin à la proposition de réforme : à ces conditions, on leur promettait la neutralité et la garantie de leurs droits souverains. Ces gouvernemens avaient jusqu’au soir pour répondre. Ils refusèrent, et le 16 juin leurs territoires furent envahis[1]. La Saxe en donna aussitôt avis à la diète, demandant que des mesures répressives fussent prises sur-le-champ, et que l’Autriche et la Bavière en particulier fussent invitées à défendre contre la Prusse les états confédérés attaqués par elle. Les envoyés d’Autriche et de Bavière déclarèrent que leurs gouvernemens étaient prêts à agir immédiatement. La motion saxonne fut adoptée. La Prusse la considéra comme une déclaration de guerre, et fit notifier aux commandans des avant-postes autrichiens le commencement des hostilités. C’était à l’armée maintenant d’achever ce que la politique avait préparé avec tant de bonheur, sinon de loyauté. L’action de ce côté ne fut pas moins résolue, ni l’audace moins heureuse.


II.

Avant d’entreprendre un récit succinct des opérations de guerre en Bohême et sur le Mein, il est indispensable de faire connaître quelles étaient, au moment où les hostilités commencèrent, la situation et les forces des armées belligérantes. Que la Prusse se fût de longue main préparée à la guerre, cela ressort des événemens mêmes avec une entière évidence. Elle avait mis à profit avec une persévérance continue les loisirs d’une paix prolongée. L’armée avait été réorganisée; on avait, malgré les chambres, augmenté l’armée active aux dépens de la landwehr. Pour obtenir ce résultat, on avait bravé un conflit parlementaire de cinq années et l’impopularité qui en était la suite. Un armement nouveau donnait aux soldats prussiens l’avantage d’un tir plus rapide. L’armée rendue plus forte, on voulut la rendre plus mobile. Tout fut combiné pour assurer la célérité des mouvemens de concentration et de transport. La campagne des Français en Italie et surtout la guerre de sécession en Amérique avaient montré toutes les ressources que l’art militaire pouvait trouver dans les applications de l’industrie moderne. Ces nouveaux moyens de tactique avaient été étudiés avec un soin par-

  1. Le même jour, la Prusse invita par des notes identiques les petits états du nord à adhérer à son alliance, au prix de la garantie de leur indépendance et de leur intégrité, dans la mesure des principes de réforme proposés le 10 juin. Sase-Meningen et Reuss aînée refusèrent seuls; les autres états acceptèrent.