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toute la flotte. En Holstein, où il représentait l’Autriche, le général de Gablenz n’avait que 7,000 hommes; il évacua Kiel et se replia sur Altona.

La diète cependant ne pouvait se résoudre à prendre un parti au sujet de la déclaration autrichienne. La divergence des cabinets empêchait à cette heure encore une entente efficace. On attendait la rupture, et personne n’en voulait prendre l’initiative. Le débat dégénérait en récriminations. On ne s’était accordé que pour demander aux deux grandes puissances le 5 juin, sur la proposition de la Bavière, de retirer leurs troupes de Rastadt, Mayence et Francfort. Il fallait pour amener une décision quelconque qu’un événement y forçât en précipitant les choses. Ce fut l’effet de l’entrée des Prussiens en Holstein. L’Autriche protesta contre cette invasion, l’envoyé prussien protesta de son côté contre l’intention prêtée à son gouvernement d’annexer les duchés par la force; il déclara que l’on était prêt à Berlin à résoudre pacifiquement la question du Slesvig-Holstein conjointement avec celle de la réforme. Cette ouverture ne fut point accueillie. D’autre part, la commission des 9 ne se hâtait nullement de terminer son travail d’examen. M. de Bismarck vit dans ces lenteurs un atermoiement calculé, et le 10 juin il adressa directement aux états allemands un exposé des principes sur lesquels reposerait la réforme proposée par la Prusse[1]; il invita les cabinets à les étudier et à faire savoir à Berlin s’ils seraient disposés à y adhérer dans le cas éventuel où le pacte fédéral viendrait à être rompu.

Manteuffel pendant ce temps continuait d’avancer en Holstein. Il occupa Itzehoë, où les états étaient convoqués, ferma la chambre, dispersa la réunion, ordonna quelques arrestations, et sous prétexte de rétablir le gouvernement commun renvoya partout les fonctionnaires augustenbourgeois. Gablenz se retira sur Hambourg, et regagna l’Autriche par le Hanovre et Cassel. L’envoyé autrichien notifia le 11 à la diète ces mesures, dont il demanda la répression en vertu de l’article 19 de l’acte fédéral de Vienne; il proposa en conséquence de mobiliser tous les corps d’armée fédéraux n’appartenant pas à la Prusse. Le lendemain, les relations diplomatiques furent rompues entre les deux puissances par le rappel des ambassadeurs. Le vote sur la proposition autrichienne avait été renvoyé

  1. C’étaient, à peu de chose près, ceux qui servirent de base à la confédération du nord. En voici la substance : exclusion de l’Autriche et des pays appartenant au roi des Pays-Bas, convocation d’un parlement, formation d’un pouvoir fédéral dirigeant les matières économiques, investi de la représentation diplomatique et du droit de paix et de guerre, établissement d’une armée commune commandée pour le nord par le roi de Prusse, pour le midi par le roi de Bavière.