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Mme DE LAFAYETTE


Le public français a été surpris et charmé, il y a trois ans, par l’apparition d’une biographie de Mme de Montagu. Anne-Paule-Dominique de Noailles, marquise de Montagu, était destinée par sa naissance à vivre dans le monde le plus brillant, quand la révolution de 1789 éclata. Son beau-père et son mari partirent pour l’émigration, où elle les suivit. Le tableau de sa vie n’est que l’histoire des longues souffrances qu’elle endura avec un admirable courage. Ce touchant récit vient de recevoir un complément plus intéressant encore ; c’est une vie de Mme de Lafayette, sœur de Mme de Montagu, précédée d’une notice sur leur mère, la duchesse d’Ayen. Pour comble d’intérêt, Mme de Lafayette a écrit elle-même la notice sur sa mère, et sa propre histoire a été racontée par sa fille, Mme de Lasteyrie. Jamais famille ne fut aussi féconde en femmes héroïques, saintement dévouées à leurs devoirs, éprouvées par les plus terribles malheurs. L’illustration du rang et l’éclat de la gloire viennent rehausser ces souvenirs ; mais quand même il ne s’agirait pas de si grands noms, tant de grâces et de vertus suffiraient pour inspirer l’étonnement, le respect et l’admiration.

La notice sur la duchesse d’Ayen est aujourd’hui publiée pour la première fois ; mais elle avait été déjà imprimée à un très petit nombre d’exemplaires par la duchesse de Luynes, qui avait une imprimerie à son usage au château de Dampierre. Petite-fille du chancelier d’Aguesseau, Mme d’Ayen avait été élevée sous les yeux de son grand-père, dont on a conservé quelques lettres adressées à sa chère Henriette. C’était déjà une femme exemplaire que la femme du chancelier, elle qui disait à son mari menacé par Louis XIV d’une disgrâce absolue : « Oubliez femme et enfans, ne songez qu’au devoir et à l’honneur. » Le