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de l’Angleterre une somme considérable de profits, rattachés non plus au marché de Londres au point de vue des marchandises et des bénéfices de l’armateur et du négociant, mais aux facilités que procurent les banques publiques et privées et les relations financières. Il est peu de pays qui n’acquittent encore de nombreux intérêts et de larges commissions à l’Angleterre, à laquelle un transit séculaire conserve cette prééminence.

Le mode de règlement des droits divers et des dettes contractées, au nombre desquelles il faut ranger, surtout pour des états tels que l’Angleterre et la Russie, les dépenses de voyage faites par un grand nombre d’habitans, se résume, pour la plupart des transactions internationales, en lettres de change sur l’étranger. Celles-ci forment des catégories nombreuses, qui toutes concourent à la liquidation des comptes respectifs en épargnant les risques et les dépenses du transport du numéraire. Un échange s’accomplit entre le vendeur de l’effet et l’acheteur. Le premier cède contre un paiement sur place le droit qu’il possède vis-à-vis du débiteur étranger, et l’acheteur remet l’effet dont il est devenu maître au créancier étranger qu’il doit lui-même solder. C’est ici qu’intervient l’action du commerce spécial de ces lettres ; elle accommode suivant les circonstances, d’une manière directe ou en accomplissant un circuit nécessaire, les exigences de la demande avec les besoins de l’offre. Les cambistes, puisqu’il faut les appeler par leur nom, rendent un service généralement peu compris. M. Goschen a développé un talent remarquable en décrivant avec une lucidité parfaite des transactions que l’on croit hérissées d’aspérités et voilées aux regards du vulgaire par une terminologie technique presque indéchiffrable. Rien n’est omis dans ce tableau, qui emprunte de l’animation et même une sorte d’éclat à la parfaite entente du sujet.

Pour un œil exercé à déchiffrer l’histoire d’une lettre de change, il devient facile à simple vue de lire sur l’effet même la trace de l’origine et d’en déterminer la nature. L’étude d’un gros bordereau apprend beaucoup sur les affaires internationales. On y rencontre d’ordinaire le reflet de toutes les transactions qui se résolvent en engagemens d’un pays envers un autre. La majeure partie se compose du prix des produits ou des marchandises, surtout quand il s’agit de contrées éloignées, et dont les relations sont relativement simples. Pour ceux entre lesquels se multiplient les rapports de voisinage, les affaires qui prennent corps dans les lettres de change se diversifient et se compliquent. Les dépenses des résidens étrangers, les encaissemens des revenus ou les rentrées provenant de sources nombreuses, — l’achat et la vente des fonds publics, le transport des capitaux, la souscription d’un emprunt, des actions,