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aujourd’hui 10,000 : ce chiffre est assez significatif pour se passer de commentaires. En dépit des progrès accomplis par la seule ville de Londres, elle ne peut pas encore, à ce point de vue, rivaliser avec celle de Paris. Bien que les écoles gratuites de dessin n’aient été fondées à Paris qu’en 1766, c’est-à-dire dix ans après celles de Strasbourg et six ans après celles de Nantes, Paris, ayant pris une fois son rang, ne l’a pas perdu. En 1846, le budget de l’instruction primaire pour Paris était arrivé au chiffre déjà considérable de plus de 1 million, et pourtant la ville n’administrait encore par elle-même aucune école de dessin. Elle se contentait d’accorder une subvention d’une trentaine de mille francs aux établissemens chargés de l’enseigner. Aujourd’hui on dépense plus de 5 millions pour l’enseignement primaire municipal. Une seule ville au monde, New-York, dépasse en libéralité la ville de Paris. Les sommes qui y sont affectées à l’instruction suffiraient à défrayer plus d’un petit état européen ; elles proviennent surtout de donations particulières. Nous n’en sommes pas là en France. A Paris, 12,000 fr. seulement sur le budget des écoles sont dus à des donations ou à des legs. Quoi qu’il en soit, les arts n’ont pas à se plaindre chez nous du lot qui leur est fait. En 1867, plus de 300,000 francs ont été consacrés à Paris seulement à l’enseignement du dessin.

Nous avons dit que l’Angleterre avait fait des sacrifices notables pour donner l’enseignement du dessin aux femmes. Mentionnons ce qui a été essayé en France. Sans parler des écoles spéciales pour les femmes, d’organisation assez récente à Paris, on a tenté de plusieurs façons de répandre ces notions chez les jeunes filles, et de leur faire trouver dans l’art une carrière honorable. C’est ainsi que nous avons depuis peu une école qui rappelle cette fondation, instituée à Montmorency en 1674, plus tard à Rueil, puis à Choisy, enfin à Saint-Cyr par Mme de Maintenon, et qui, transformée au temps du premier empire, prit le nom de maison de Saint-Denis ; nous voulons parler de l’école connue sous le nom de Notre-Dame-des-Arts. Établie d’abord dans un petit hôtel de la rue du Rocher, Notre-Dame-des-Arts s’est développée rapidement. On l’a transférée dans le château de Mme Adélaïde, au parc de Neuilly. C’est, à proprement parler, « un collège destiné à former des artistes femmes pour les industries d’art et des professeurs femmes pour les écoles primaires d’art pratique spéciales aux filles. » Le prix de la pension des élèves est de 1,200 fr. ; on l’a doublé pour les élèves étrangères. Cette faveur si grande faite à la nationalité française nous étonne et nous paraît regrettable. Quoi qu’il en soit, Notre-Dame-des-Arts compte aujourd’hui 150 élèves, que dirigent 18 personnes, assistées par 15 « auxiliaires » qui ne sont autres que d’anciennes élèves. L’état,