Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 76.djvu/849

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le professeur Matteucci, qui les dénonce dans un intéressant rapport présenté au sénat en 1867. Les écoles secondaires sont les plus utiles de toutes pour une nation qui veut se relever. C’est là que se forment les classes moyennes, celles qui font les affaires des pays libres. M. Matteucci s’effrayait en voyant les lycées du royaume si peu peuplés ; il se demandait avec angoisse d’où pouvaient sortir les 1,500 jeunes gens qui entrent chaque année dans l’administration : ils n’ont donc pas même fait leurs classes ! Ils ignorent non-seulement le grec et le latin, mais l’italien, l’histoire, les élémens des sciences, et cependant ils gouvernent, car l’Italie est encore gouvernée par les bureaux ! Le rapport de M. Matteucci était sans doute un peu noir, c’était un projet de réformes ; or il est rare qu’en proposant des remèdes on n’exagère pas le mal. Nous avons visité cet hiver plusieurs écoles secondaires qui ne nous ont point frappé par le manque d’écoliers ; peut-être nous a-t-on montré les plus peuplées. Les élèves appartenaient en général à des familles aisées ; un quart d’entre eux étaient fils de commerçans, un cinquième sortaient de maisons pauvres ; le gouvernement accordait des bourses assez libéralement. Les lycéens de la Basilicate se distinguent par une singulière aptitude aux études classiques. Quant aux écoles techniques, où, au lieu de grec et de latin, l’on apprend le français, la comptabilité, les élémens des sciences, le nombre s’en accroît chaque jour. Il s’en est ouvert 46 dans l’année courante, dont 43 ont inscrit entre elles 4,623 élèves. Ces chiffres, quoique encore inédits, sont officiels, nous les devons à une obligeante communication de M. le docteur Maestri. Ces réserves faites, nous confessons avec M. Matteucci qu’il reste beaucoup à réformer. L’Italie a cru qu’il suffirait d’ouvrir des écoles pour répandre partout la lumière ; elle s’est trompée. Il y a maintenant des lycées dans toutes les provinces, sauf à Grosseto et à Pesaro ; 9 provinces en ont 2, 2 provinces (Milan et Turin) en ont 3 : 88 lycées en tout, 20 de plus qu’en France ! Il n’y manque, hélas ! que des maîtres et des lycéens.

Un projet de loi pour réformer l’instruction secondaire a été présenté au sénat. Ce projet aurait dû être discuté l’an dernier et le sera peut-être cette année, si le parlement consent à abréger ses discours. Voici sommairement les réformes proposées : réduire à 24 les lycées du gouvernement et laisser les autres, ainsi que les internats, à la charge des provinces, rassembler dans ces 24 lycées modèles les bons professeurs disséminés dans toute l’Italie, réunir les gymnases et les écoles techniques en adjoignant à celles-ci des classes de latin et une école normale pour les instituteurs primaires, garder trois ans dans ces écoles mixtes les élèves, qui entreront ensuite au lycée, où leur instruction classique les