Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 76.djvu/848

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ils n’en firent rien, préférant la guerre ouverte. L’Italie put donc légalement fermer 82 séminaires, dont la plupart, il est vrai, tombèrent d’eux-mêmes. En même temps, contre les corporations religieuses, le nouveau régime invoqua la loi piémontaise du 29 mai 1855 ; L’objet de cette loi, timide encore, était de former avec les biens des corporations éteintes un fonds ecclésiastique pour subvenir aux besoins du culte, insuffisamment doté. La loi s’élargit un peu quand elle fut appliquée par les gouvernemens de transition dans l’Ombrie, les Marches, l’Emilie, les provinces napolitaines ; une partie des rentes de ces corporations fut attribuée à l’instruction, populaire et aux établissemens de bienfaisance ; les communes obtinrent les locaux de quelques couvens supprimés. Plus tard, comme on sait, le 7 juillet 1866, le parlement de Florence osa frapper le grand coup : il supprima les corporations religieuses, et fit passer tous leurs biens dans les mains de l’état, la mainmorte fut décidément abolie. Le clergé enseignant en a jusqu’ici peu souffert ; près de 200 séminaires et plus de 1,000 instituts religieux sont encore ouverts et assez peuplés, plus de 8,000 prêtres réguliers et séculiers, près de 3,000 nonnes, tiennent encore des classes publiques ou privées. C’est que les lois ne suffisent pas contre les puissances morales, l’Italie devrait le savoir depuis longtemps. Le meilleur moyen de combattre l’enseignement religieux est de développer et surtout d’améliorer l’enseignement laïque ; c’est ce qui a été fait dans les écoles primaires, où le clergé a désormais le dessous. Il a perdu beaucoup de terrain dans les provinces du midi ; c’est là d’ailleurs qu’il avait le plus de terrain à perdre. La Basilicate entretenait autrefois 257 prêtres pour 100 laïques dans ses rares maisons d’éducation. Cette province a maintenant congédié bon nombre de ces religieux et toutes les religieuses, il n’en restait pas une seule en 1864 dans les écoles déjà plus nombreuses de ce pays si longtemps négligé. Il y a donc progrès partout et de toute façon dans l’instruction primaire.

En peut-on dire autant de l’enseignement secondaire ? Hélas ! les documens que nous avons sous la main nous laissent peu d’illusions à cet égard. En mettant de côté les séminaires, les écoles privées, dont le nombre est considérable, l’Italie possède, il est vrai, 88 lycées, dont 78 appartiennent au gouvernement ; mais ces derniers ne réunissaient entre eux tous que 4,000 élèves, et en ajoutant à cette population bien peu serrée la population moins dense encore des internats (convitti), des gymnases et des écoles techniques, il se trouvait que chaque école secondaire du gouvernement n’attirait en moyenne, de 1865 à 1866, que 26 écoliers ! Voilà des faits attristans que nous n’empruntons point aux journaux de l’opposition ; c’est un des hommes éminens que l’Italie vient de perdre,