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des chambres wurtembergeoises, et cette fois le résultat a été assez différent. Le parti national allemand, qui est à l’œuvre dans le Wurtemberg comme partout, a enlevé dix nominations. Le gouvernement lui-même, pour populariser ses candidats, a été obligé de déclarer que sa politique ne tendait qu’à resserrer les liens de l’Allemagne du sud avec la confédération du nord. Il n’a pas moins subi une défaite assez sensible, d’autant plus que le « parti du peuple, » sur lequel il s’était appuyé jusqu’ici, commence à se tourner contre lui. Sait-on comment on appelle le parti fédéraliste dans le Wurtemberg et dans toute l’Allemagne du sud ? On l’appelle le parti de l’étranger, et avec cela on a raison de bien des cœurs simples qui, tous bons Souabes qu’ils soient, ne veulent pas se montrer moins patriotes que les autres. Tout ce qui est national tourne désormais presque nécessairement au profit de la puissance prussienne. Ce n’est pas que dans ce mouvement très complexe l’Autriche n’ait regagné quelque avantage par sa politique nouvelle, par ses allures libérales si nettement avouées. Pour bien des esprits, elle est encore le vieil empire, et les manifestations qui ont lieu en ce moment même à Vienne à l’occasion des fêtes du tir allemand prouvent que tout prestige n’est pas évanoui pour l’Autriche, qu’elle peut encore retrouver un rôle, que bien des Allemands ne la séparent pas de la grande patrie. Tout n’est pas dit sans aucun doute sur cette étonnante transformation de l’Allemagne. Il y a un dernier mot toujours possible ; mais enfin dans cette lutte qui peut réserver encore bien des surprises, c’est bien la Prusse qui a aujourd’hui la suprématie au-delà du Rhin ; il lui reste à étendre cette suprématie en l’affermissant, à s’asseoir dans ce rôle de grande puissance allemande qu’elle a si brusquement conquis.

La Prusse a l’avenir pour elle, c’est infiniment vraisemblable ; elle n’a pas moins beaucoup à faire, et pour digérer sans péril ce qu’elle a si vaillamment dévoré, et pour maintenir une situation diplomatique qui lui permette de gagner du temps, de préparer cet avenir, d’attendre des occasions nouvelles pour pouvoir dire, elle aussi, un beau jour : Andremo al fondo ! Dans cette situation diplomatique, l’Italie peut certes avoir une action décisive, comme elle l’a eue déjà à un certain moment, et son nom ne laisse pas d’être prononcé dans toutes les combinaisons qui s’essaient, qui partagent l’Europe en deux camps, et qui, à la vérité, n’apparaissent quelquefois que pour être remplacées par d’autres combinaisons. A Florence comme partout, la question des alliances s’agite incessamment. Il y a les partisans de l’alliance prussienne, il y a les partisans de l’alliance française. Entre une discussion sur la mouture et une polémique sur la compagnie des tabacs, c’est le thème naturel des controverses. Or voilà justement cette question de l’alliance prussienne qui vient de se réveiller incidemment et de retentir jusque dans le parlement de Florence à propos d’une interpellation du général La Marmora. Ce n’est pas la question de l’avenir, direz-vous ; c’est mieux encore,