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alimente le foyer. Si la température descend à 92 degrés, et par conséquent devient trop faible, cet appareil, qui figure à peu près une balance, soulève son plateau, et laisse l’oxygène entrer en plus grande quantité ; si au contraire la température monte à 97°, il abaisse le même plateau, intercepte le courant d’air, et par le fait diminue l’intensité du feu sans cependant lui permettre de s’éteindre. C’est merveilleux, et il est difficile de ne pas être saisi d’admiration en présence d’un pareil chef-d’œuvre ; il peut servir non-seulement à la torréfaction du tabac, mais encore à toute industrie qui a besoin pour s’exercer convenablement d’une température quelconque, maintenue à une moyenne toujours constante.

Quand le tabac a subi le degré de chaleur voulu, et qu’il s’accumule contre les parois postérieures du cylindre, celui-ci s’ouvre de lui-même par une valvule qui laisse échapper le trop-plein, mais dont le jeu est tellement rapide et si bien combiné, que la proportion d’air froid introduite est insignifiante. Lorsque le scaferlati vient de subir un pareil coup de feu, il est, quoique humide encore, fort sec en apparence et tout frisottant ; il faut le refroidir et du même coup le débarrasser des poussières qu’il contient. Pour cela on le soumet pendant quelques instans à un fort courant d’air produit par un ventilateur dans un cylindre à rotation qui fait, comme le torréfacteur, circuler le tabac au moyen de lames disposées en hélices, et ne lui laisse pas un moment de repos. Cette ventilation puissante rejette toutes les poussières dans une chambre spéciale, pénètre le scaferlati, et suffit pour lui donner de la consistance, comme l’eau froide donne la trempe à l’acier rougi. Toutes les opérations essentielles sont alors terminées ; le tabac, qui offre une certaine ressemblance avec des cheveux coupés et crespelés, est réuni en masse dans une chambre aérée. Il reste là six semaines environ ; puis on le visite lestement pour enlever les côtes trop grosses qui, ayant glissé sous le hachoir, ressemblent à des bouts d’allumettes, les fragmens de fer, de cuir, de bois, qui ont pu s’y introduire ; on le purge, en un mot, dans les limites du possible, de toute matière étrangère, puis on le pèse et on en fait des paquets fermés, scellés d’une étiquette qui relate le poids, la qualité, la date du décret d’autorisation et le timbre des contributions indirectes. Cette étiquette est aux tabacs ce que le poinçon de garantie est aux ouvrages d’or et d’argent. On devrait aussi indiquer la date de la fabrication, ce qui permettrait aux amateurs de tabac frais, et ils sont nombreux, de ne pas acheter dans les débits des paquets dont le contenu se pulvérise dès qu’on les ouvre. Il est aussi une amélioration que bien des personnes voudraient voir apporter dans la fabrication du scaferlati, et qui concorderait avec les