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CLEMENT MAROT

Œuvres de Clément Marot, annotées, revues sur les éditions originales et précédées de la vie de Clément Marot, par M. Ch. d’Héricault, 1 vol. grand in-8o ; Garnier frères.

Voilà bientôt un demi-siècle que la critique moderne s’est avisée de remettre en lumière, de commenter et d’annoter les monumens littéraires et poétiques de notre XVIe siècle. La mine est riche, et promet de se prêter encore à plus d’un genre d’études et de recherches. Le premier qui s’en empara, dès le début des luttes littéraires de la restauration, fut M. Sainte-Beuve. C’étaient ses premières armes ; il sortait du collège, déjà critique consommé, sinon par expérience, du moins par vocation, chercheur et curieux, amoureux de détails plus que de théories, et s’attachant à ces poésies abandonnées, à ces vieux maîtres hors de mode, par instinct de novateur en quête d’autorités. Il voulait abriter de modernes audaces sous d’anciennes célébrités. Peut-être cédait-il aussi à la contagion d’amis archéologues tels qu’Auguste Le Prévost, Nodier, Victor Hugo : c’étaient ses cathédrales à lui que les rimeurs de la pléiade. Il raconta leurs vies, tira de l’oubli leurs œuvres, nettoya leurs portraits enfumés, mais toujours en lettré plutôt qu’en chroniqueur, donnant le pas aux aperçus de la critique sur les informations de l’histoire. Il marchait à un but et servait une cause. En secouant la poudre où dormaient ces vieux vers, il entendait prouver que le mouvement poétique en France n’avait pas commencé seulement à Malherbe. C’était Boileau qu’il réfutait en évoquant Marot, Ronsard,