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LETTRES
D'UN VOYAGEUR
A PROPOS DE BOTANIQUE


A M. GUSTAVE TOURANGIN A SAINT-FLORENT.


Nohant, 28 avril 68.

Mais non, mon cher Micro, je ne suis plus au pays des anémones, je suis au doux pays de la famille, où vient de nous fleurir une petite plante plus intéressante que toutes celles de nos herbiers. Le beau soleil qui rit dans sa chambre et la douce brise de printemps qui effleure son rideau de gaze sont les divinités que j’invoque en ce moment pour elle, et je laisse les cactus et les dattiers de la Provence aux baisers du mistral, qu’ils ont la force de supporter.

J’ai passé un mois seulement sur le rivage de la mer bleue. Le rapide, — c’est ainsi que les Méridionaux appellent le train que l’on prend à Paris à sept heures du soir, nous déposait à Marseille le lendemain à midi. Une heure après, il nous remportait à Toulon.

Je regrette toujours de ne plus m’arrêter à Marseille : les environs sont aussi beaux que ceux des autres stations du littoral, plus beaux peut-être, si mes souvenirs ne m’ont pas laissé d’illusions. Ce que j’en vois en gagnant Toulon, où nous sommes attendus, me semble encore plein d’intérêt. Le massif de Carpiagne, qui s’élève à ma droite et que j’ai flairé un peu autrefois sans avoir la liberté d’y pénétrer, — j’accompagnais un illustre et cher malade que tu as connu et aimé, — m’apparaît toujours comme un des coins ignorés du vulgaire, où l’artiste doit trouver une de ses oasis. C’est