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tarifs ont été quelque peu abaissés ; malgré cela, le ministre compte sur une plus-value, parce qu’il propose de substituer les déclarations publiques et un certain contrôle aux affirmations confidentielles et trop souvent inexactes dont le fisc se contentait précédemment. On pense que ces procédés sévères élèveront l’impôt sur le revenu à plus de 18 millions. En définitive, le produit des cinq contributions directes figure dans le premier budget de la Hongrie pour 136,860,000 francs. Certes la somme est forte pour un peuple de 15 millions d’âmes comprimé et exploité pendant des siècles, éclos d’hier seulement à la vie nationale. Comparativement le sort fait à la propriété française semblerait un régime de faveur ; mais il y a en Hongrie l’indépendance d’un peuple à conquérir, une bataille pacifique à livrer contre les ennemis qui manœuvrent dans l’ombre. Des embarras intérieurs, mettant en échec la nationalité qui surgit, coûteraient certes beaucoup plus aux propriétaires hongrois que les sacrifices passagers qu’on leur demande, et le ministre insinue très finement qu’en cette circonstance le patriotisme, s’il n’était pas un devoir, serait encore la plus intelligente des spéculations.

Si les contributions directes sont surchargées, l’évaluation provisoire des impôts et revenus indirects est calculée de manière à présenter un allégement par comparaison avec le régime autrichien. Les droits de consommation établis sur les spiritueux, les vins, la bière, la viande de boucherie et le sucre ne sont cotés que pour 26,807,500 francs ; c’est moins de 2 francs par tête, tandis que les mêmes articles produisent en France environ 9 francs par tête, et en Angleterre 22 francs. Cette branche de la fiscalité hongroise est évidemment destinée à fournir des plus-values considérables au moyen desquelles on soulagera la propriété surchargée. Les procédés perfectionnés de distillation nouvellement introduits ont eu pour premier effet de soustraire à l’impôt une partie de la production ; mais un projet de loi sur la fabrication des spiritueux, déjà soumis aux chambres, rétablira les droits du fisc sans entraver le progrès industriel. Le vin, une des richesses naturelles de la Hongrie, deviendrait une source importante de revenus, si on voulait l’exploiter avec rigueur ; au contraire le budget nouveau maintient l’immunité pour le vin réservé à la consommation domestique. D’un autre côté, la difficulté des transports, faisant obstacle aux mouvemens commerciaux, limite le contingent du trésor public à moins de 5 millions. Les voies ferrées, les routes et les canaux en construction auront, à n’en pas douter, une influence marquée sur ce genre de recette. La fabrication du sucre de betterave a été encouragée en ces derniers temps par d’abondantes récoltes, et l’ou-