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dans ces ballons? » Ainsi les argumentations contraires restent debout et s’entament à peine l’une l’autre. Jusqu’ici le profit le plus clair de la querelle se trouve dans les découvertes de MM. Coste et Gerbe et les travaux de M. Balbiani sur la génération des infusoires. M. Claude Bernard a été chargé par l’Académie des Sciences de faire un rapport sur la question des générations spontanées; tout en rendant justice aux travaux de M. Pasteur, il s’est montré assez réservé sur les conclusions expérimentales qu’il est permis d’en tirer. Bien que la question de fait demeure ainsi à peu près entière, M. Claude Bernard n’hésite pas à se ranger parmi les adversaires de l’hétérogénie. Il puise sa conviction dans les nécessités qui lui paraissent inhérentes à la propriété évolutive de l’œuf. La formation spontanée d’un germe lui semble inadmissible, même comme hypothèse. « Je considère, dit-il, que l’œuf représente une sorte de formule organique qui résume les conditions évolutives d’un être déterminé par cela même qu’il en procède. L’œuf n’est œuf que parce qu’il possède une virtualité qui lui a été donnée par une ou plusieurs évolutions antérieures dont il garde en quelque sorte le souvenir. C’est cette direction originelle, qui n’est qu’un atavisme plus ou moins prononcé, que je regarde comme ne pouvant jamais se manifester spontanément et d’emblée. Il faut nécessairement une influence héréditaire. Je ne concevrais pas qu’une cellule formée spontanément et sans parens put avoir une évolution, puisqu’elle n’aurait pas eu un état antérieur. » Est-ce bien juste? Que nous rapprochions les idées d’atavisme et de propriété évolutive, que nous voyions dans ce rapprochement le résultat de l’expérience des siècles, rien de mieux ; mais faut-il pour cela regarder l’hérédité comme la cause nécessaire de toute manifestation évolutive ? Ce n’est point là une conception qui s’impose à notre esprit, et à nos yeux elle n’a que ce degré de vraisemblance que lui donne jusqu’ici l’étude des faits.

Quoi qu’il en soit, la connaissance détaillée de la constitution de l’œuf est une conquête de la science contemporaine. En France, les travaux de MM. Prévost et Dumas ont été l’origine des progrès de l’embryogénie. L’étranger peut citer aussi à ce sujet des noms célèbres, ceux de Baer, Purjinke, Bischoff. L’œuf ou cellule ovarique est constitué comme une cellule ordinaire. On y distingue une enveloppe ou membrane vitelline, un liquide intérieur ou vitellus, un noyau ou vésicule germinative et un nucléole ou tache germinative. M. Balbiani y a découvert en outre récemment un corps particulier qu’on pourrait appeler vésicule germinative proprement dite, car il est destiné à fournir les matériaux plastiques nécessaires au développement de l’être nouveau. Il y a ainsi dans l’ovule deux noyaux