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travaux récens, ceux de M. Charles Robin en particulier, permettent pourtant de les rapporter dans chaque partie élémentaire à un centre particulier, au noyau de la cellule primitive. On sait que, d’après les vues émises d’abord en Allemagne par Schleiden et Schwann, on regarde tous les élémens anatomiques comme dérivant de cellules qui tantôt conservent la forme cellulaire, tantôt subissent des modifications plus ou moins profondes. La cellule est essentiellement formée d’une enveloppe, d’un contenu liquide ou pâteux et d’un noyau qui renferme lui-même un point particulier ou nucléole. Que la cellule conserve sa forme propre ou qu’elle subisse des métamorphoses, on peut toujours suivre ce qui en constitue le noyau. Or ce noyau paraît jouer un rôle essentiel dans la nutrition élémentaire. Chaque fois qu’on a pu examiner le développement cellulaire, on l’a vu continuer aussi longtemps que le noyau persistait et cesser au moment même où le noyau venait à disparaître. Quand les cellules se renouvellent, elles le font par une véritable prolifération de noyaux; c’est ainsi qu’au-dessous de la surface de certaines membranes muqueuses on voit dans la couche profonde des noyaux destinés à devenir les générateurs de cellules nouvelles. Dans les fibres que l’on peut considérer comme des cellules transformées, dans les fibres musculaires par exemple, le noyau cellulaire persiste en dedans de la paroi fibreuse et maintient la nutrition de l’élément par une sorte de sécrétion de la matière contractile. Quant à la libre nerveuse, c’est un fait connu qu’elle s’altère et dégénère dès qu’elle est séparée d’une cellule qui est comme son organe nutritif. L’ensemble de ces faits conduit les physiologistes à regarder le noyau cellulaire comme un centre de rénovation permanente. Pour que les divers élémens se nourrissent, il faut d’une part qu’ils se trouvent dans un lieu convenablement préparé, d’autre part que leur centre de nutrition soit sain et apte à profiter des conditions de ce milieu; il faut qu’ils aient à la fois bonne alimentation et bon appétit.

Dans les faits que nous venons de rapporter, on a vu peu à peu la notion de nutrition et celle de création organique se confondre, et l’on a rencontré quelques-uns des argumens à l’aide desquels M. Claude Bernard établit que la nutrition est une sorte de génération continue. Le rôle nutritif du noyau cellulaire est en effet un véritable rôle d’organe générateur. Dans les êtres placés aux derniers degrés de l’échelle animale, chaque cellule peut servir de centre de régénération à l’organisme entier; c’est ainsi que chaque fragment d’un polype hydraire ou d’une planaire reforme un animal complet. Chez les êtres supérieurs, on voit quelquefois se régénérer par le même principe, non pas un animal entier, mais du