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d’une atroce douleur. Pour compléter ce tableau, ou du moins pour n’y pas omettre un trait essentiel, il faut avoir égard à la réaction qu’exerce sur la sensibilité nerveuse le cerveau, plus ou moins baigné, plus ou moins excité par le sang. Ainsi se ferme un cycle où l’on peut chercher l’explication d’un grand nombre de phénomènes. En résumé, le cœur, qui est le plus sensible des organes de la vie végétative, reçoit le premier l’influence cérébrale; le cerveau, qui est le plus sensible des organes de la vie animale, reçoit le premier l’influence de la circulation sanguine. Ces deux rouages culminans de la machine vivante réagissent donc incessamment l’un sur l’autre par des effets d’autant plus nombreux et plus déliés que l’organisme est plus développé et plus délicat.


III.

Il faut, pour l’entretien normal des différens élémens dont le corps est formé, que le milieu intérieur, le sang, se renouvelle à mesure qu’il est vicié et conserve ainsi une composition à peu près constante. Les phénomènes d’absorption, d’excrétion, de sécrétion, concourent à ce but. De l’ensemble résulte une sorte d’équilibre dans l’état du sang; mais les phénomènes offrent par eux-mêmes une très grande diversité. Ils se produisent à l’aide des élémens épithéliaux, qui se présentent sous la forme tantôt de cellules isolées, tantôt de membranes, tantôt de glandes, et qui affectent des modes d’action très variés. Au milieu de ces manifestations si différentes, la science contemporaine n’ose, pour ainsi dire, encore aborder aucune généralisation, tout son progrès consiste à spécialiser et à distinguer les actions locales.

On a cependant pour certaines classes de phénomènes un point de départ dans l’endo-exosmose, découverte par Du Trochet. En cherchant à comprendre comment les liquides passent à travers les cellules organiques, Du Trochet reconnut que deux courans parallèles et de sens inverse s’établissent entre des substances de nature et de densité différentes, lorsqu’on les met en présence l’une de l’autre à travers une cloison membraneuse. Une vésicule pleine d’eau gommée absorbe par endosmose l’eau ambiante et se gonfle jusqu’à subir une tension considérable. C’est là le simulacre de la fonction absorbante des membranes séreuses, muqueuses, cutanées. Le phénomène inverse sert à expliquer le mouvement de divers sucs distillés par l’organisme. Du Trochet, enthousiasmé de sa découverte, la publiait sous une rubrique pompeuse; son mémoire portait pour titre l’Agent immédiat du mouvement vital dévoilé dans sa nature et dans son mode d’action. Et de fait la découverte de Du Trochet a été particulièrement féconde. Elle a été l’origine