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difficultés qui ne sont que notre ouvrage. » Faisant le tableau du régime de la Provence, où se trouvait, selon lui, cette simplicité, Mirabeau le présentait à l’assemblée, comme un exemple à suivre. En défendant le projet du comité, Thouret défendait son œuvre et non celle de Sieyès, comme on l’a pensé ; il en avait pris l’idée dans l’organisation de sa province, et déjà l’avait indiquée dans son plan de constitution. « L’assemblée provinciale de la Haute-Normandie, disait-il, est une de celles qui ont obtenu le plus de succès ; c’est à ses assemblées de district qu’elle doit tout ce qui a réussi dans le détail et dans la pratique. Tout le pays a cette opinion d’après l’épreuve, et mon cahier me charge d’en demander expressément la conservation. » Il était un point toutefois sur lequel les deux contradicteurs se trouvaient d’accord, c’est qu’il fallait appeler aux affaires le plus grand nombre possible de citoyens, afin de généraliser les sentimens élevés qu’elles développent et de « former des sujets. » Dans les deux projets, tout était demandé au zèle du pays, rien aux fonctionnaires. Sous ce rapport, le projet du comité réclamait un plus nombreux personnel que celui de Mirabeau, même avec ses 120 départemens ; mais ce système, objectait-on encore, ne serait-il pas beaucoup trop compliqué ? Le rapporteur répondait qu’il ne fallait pas seulement songer à la rapidité du mouvement, qu’il s’agissait surtout d’en mesurer la précision. Or le département était véritablement surchargé. Outre ses propres affaires, il avait mission de surveiller celles des communes. De plus, il devait maintenir entre celles-ci l’exacte répartition de l’impôt. Comment pourrait-il, sans intermédiaires, aviser à tout et faire à chacun bonne justice ?

Les arrondissemens furent donc admis. Quant aux cantons, le comité lui-même en faisait bon marché et n’y voyait qu’un point de réunion électorale. En présence de nos rapides moyens de communication, qu’eût pensé l’assemblée des sous-préfectures ? Il est inutile de poser la question. Les sous-préfectures, telles qu’on les voit aujourd’hui, ne sont pas l’œuvre de l’assemblée ; ce n’est donc point à celle-ci que doivent remonter les critiques dont elles sont l’objet. Dans l’arrondissement comme dans les autres sphères, c’était à des citoyens que revenaient les soins du service. Pour la commune, le district et le département, le mode d’administration était uniforme : un conseil électif délibérait, un comité d’exécution était pris dans son sein, puis venait un procureur-syndic, relevant aussi de l’élection, qui veillait en toute chose à la stricte exécution de la loi. Le district n’était, à vrai dire, qu’un rouage de transmission ; mais la commune et le département étaient fortement organisés. La commune avait ses biens propres, son initiative et son pouvoir. Au-delà de ce qui était purement communal commençait seulement le contrôle supérieur ; toutefois ce contrôle était exercé par le