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l’empire. « Je vais sur-le-champ m’occuper, ajoutait M. Bigot de Préameneu, de prendre des renseignemens sur les chefs d’ordre qui viennent à Paris, tant pour savoir l’espèce de traitement qu’il convient de leur faire que pour faire connaître à votre majesté leurs qualités, leurs opinions, en un mot ce que c’est[1]. » Napoléon, tout occupé qu’il fût alors des laborieuses négociations qui suivirent l’armistice de Znaïm, trouva le temps de répondre immédiatement à M. Bigot. Le 23 septembre 1809, à un moment où la paix était encore bien loin d’être conclue avec l’Autriche, le jour même où il avait adressé à son futur beau-père, l’empereur François, une lettre passablement cassante et dédaigneuse, de la même plume avec laquelle il venait d’écrire au comte Maret un assez singulier billet, où il se vantait d’être maintenant non moins apostolique et plus chrétien que son auguste correspondant, l’ancien empereur d’Allemagne[2], Napoléon avait annoncé à M. Bigot de Préameneu « qu’il approuvait de commencer par faire venir d’abord à Paris les cardinaux français. Ce premier pas fait, on verrait, disait-il, ce qu’il serait convenable de faire pour les cardinaux du royaume d’Italie[3]. » Le lendemain, les yeux toujours tournés vers Rome, il écrivait de nouveau à son ministre des cultes afin qu’il lui adressât un rapport sur cette question : « qu’est-ce qui constitue les secrétaireries papales pour l’exercice du gouvernement spirituel de l’église ? quels sont les individus qui les composent ? combien sont-ils ? où sont-ils ? Prenez des renseignemens et rendez-m’en compte, afin que je prenne une résolution[4]. »

Nous avons déjà dit quelle fut la résolution définitive de l’empereur à l’égard des membres du sacré-collège. Nos lecteurs se souviennent sans doute qu’à peine rentré en France après le traité de paix signé à Vienne le 14 octobre 1809 Napoléon n’avait rien eu de plus pressé que de faire arriver en grande hâte à Paris non-seulement les cardinaux qu’il appelait français, parce qu’ils étaient nés dans les provinces maintenant annexées à l’empire, mais encore tous ceux du royaume d’Italie. Un très petit nombre de dispenses avait été assez difficilement accordé à quelques vieillards infirmes et presque moribonds, pour qui ce voyage avait été reconnu matériellement impossible. Nous avons eu occasion de raconter comment, à l’exception du cardinal Consalvi, ces grands

  1. Lettre de M. le comte Bigot de Préameneu à l’empereur, 15 septembre 1809.
  2. Voyez le billet de l’empereur au comte Maret, secrétaire d’état, et le projet de lettre à l’empereur d’Autriche, Schœnbrann, 23 septembre 1809. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XIX, p. 491.
  3. Lettre de l’empereur à M. le comte Bigot de Préameneu, Schœnbrunn, 23 septembre 1809. Cette lettre n’est pas insérée dans la Correspondance de Napoléon Ier.
  4. Lettre de l’empereur au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, Schœnbrunn, 24 septembre 1809. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XIX, p. 506.