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ÉTUDES ET PORTRAITS
DU
SIÈCLE D’AUGUSTE

II.
LA VEUVE DE GERMANICUS.

Quand une femme résolue soutient ouvertement un homme faible, elle l’abaisse, elle ajoute à son impuissance en accroissant ses irrésolutions. Il semble qu’Agrippine ait été funeste à Germanicus, son mari, et au parti qui lui survécut, précisément parce que sa nature droite, entière, orgueilleuse, poussait toutes choses à l’extrême, et ne connaissait ni la mesure ni la patience; mais elle offre en même temps une physionomie noble et pure, elle a joué un rôle dans l’histoire, elle mérite un portrait à côté de Germanicus[1]. Il convient de se représenter avant tout quelle est sa triple origine. Elle est petite-fille d’Auguste, elle est fille de Julie, elle est fille d’Agrippa, c’est dire qu’elle a pris d’Auguste l’ambition et l’orgueil du sang, de Julie un tempérament qui sera contenu, d’Agrippa une énergie virile qui ne le sera pas et qui dégénérera en violence; d’ailleurs, vraie matrone romaine, vertueuse, simple, observant les anciennes mœurs, enfermée dans le mariage comme dans une forteresse, ne cachant rien, pas même son ambition, moins fière de sa jeunesse ou

  1. Voyez l’étude sur Germanicus dans la Revue du 1er mai.