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tiples moyens de transport dont le commerce dispose aujourd’hui, aux rapports permanens qui existent entre les besoins de consommation et les ressources de la production, le gouvernement ne cherche plus à créer par lui-même une abondance qui presque toujours avait été illusoire et onéreuse. Il s’en rapporte à l’intelligence des négocians, et il fait bien. Tous les ans, les préfets adressent directement au ministre de l’agriculture cinq mémoires sur l’état de la culture des céréales dans leur département : le premier au moment où le blé sort de terre, le second pendant la floraison, le troisième au temps de la moisson, le quatrième après la récolte, le cinquième après le battage. Ces rapports répondent à une mesure d’ordre excellente, mais les renseignemens qu’ils renferment sont connus des négocians intéressés bien avant que le ministre les reçoive. Cependant le gouvernement en tire parti, et lorsqu’il prévoit que la récolte sera mauvaise, il se met en devoir de venir au secours des populations laborieuses. Au lieu d’acheter des blés, ainsi qu’on le faisait autrefois, ou de fixer un maximum arbitraire, il augmente la somme consacrée aux travaux publics, appelle sur les chantiers le plus d’ouvriers possible, et leur offre, en échange d’un labeur utile convenablement rétribué, les moyens d’éviter le froid, la misère et la faim.

La loi des 16-24 août 1790 confie le soin de l’alimentation de Paris à l’autorité municipale; l’arrêté consulaire du 12 messidor an VIII, qui détermine les fonctions du préfet de police, impose à ce dernier, par l’article 29, le devoir « d’assurer la libre circulation des subsistances selon la loi, » et, par l’article 33, la charge spéciale de veiller à l’approvisionnement de la ville. C’est en vertu de cet arrêté, qui est toujours en vigueur, que la préfecture de police a dans ses attributions les « halles et marchés, l’inspection des denrées alimentaires, la vérification des poids et mesures. » C’est elle qui nomme les facteurs, sorte de fonctionnaires munis d’une charge, versant un cautionnement, révocables, responsables vis-à-vis des producteurs, des acheteurs et de l’administration, — qui rendent d’innombrables services à la population parisienne en favorisant l’arrivée des denrées nécessaires sur le carreau des halles, en assurant la régularité des ventes, en épargnant à leurs commettans les frais et les ennuis des déplacemens et des recouvremens. Ils sont à peu près aux denrées alimentaires ce que les agens de change sont aux valeurs mobilières, à cette différence près que toute opération se fait au comptant, et qu’ils versent eux-mêmes régulièrement à la caisse municipale les droits d’octroi perçus sur les marchandises vendues par eux. Créés par une série d’ordonnances rendues entre l’an VIII et l’an XII, ils ont non-seulement en province, mais à l’étranger, une clientèle de producteurs avec lesquels ils sont en rap-port-