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1,250 millions que parce que la circulation métallique est trop abondante pour les besoins actuels, que le pays en est saturé, que le trop-plein s’en déverse à la Banque de France ; mais c’est là un état tout à fait transitoire. L’encaisse ne peut rester à 1,150 millions, il est appelé à baisser sensiblement un jour ou l’autre, et, le jour où il baissera, il faudra que la circulation baisse avec lui ou au moins qu’elle n’augmente pas. Au chiffre où elle est, elle satisfait largement tous les besoins, et, si elle se développait davantage, ce serait pour nous exposer, à un moment donné, à une contraction d’autant plus forte et qui ne serait pas sans danger. Ainsi l’inquiétude politique répandue en Europe, les tarifs élevés des États-Unis, qui nous ferment un grand débouché commercial, le cours forcé des billets de banque dans différens pays, enfin le développement de la circulation fiduciaire elle-même par la substitution des billets aux espèces, telles sont les causes, et il n’y en a pas d’autres, qui ont amené cet encaisse métallique prodigieux. Il nous reste à rechercher maintenant jusqu’à quel point ce milliard dont on parle est disponible et ce qu’on peut en attendre pour l’avenir.


II.

Dernièrement, dans un document officiel,. M. le ministre des finances disait qu’il ne fallait « point considérer le numéraire qui compose l’encaisse de la Banque de France comme résultant de 1 milliard sans emploi. » Il avait sans doute raison : l’encaisse doit répondre d’abord de la circulation fiduciaire, et, comme cette circulation atteint aujourd’hui 1,250 millions, il est bien évident qu’il lui faut une réserve beaucoup plus forte que lorsqu’elle n’était que de 7 ou 800 millions ; mais il aurait pu ajouter que, si ce milliard entier n’est pas disponible, une partie au moins l’est, et que sur 1,150 millions d’espèces garantissant 1,250 millions de billets on pourrait largement en retrancher 600 et peut-être 700 sans aucune espèce de péril et sans faire monter l’escompte à un taux très élevé. Et puis ce qui se passe à la Banque de France n’est qu’un symptôme de la situation. S’imagine-t-on qu’il n’y a de capitaux disponibles que ceux qui sommeillent à la Banque ? Partout ailleurs ils abondent. Le Crédit foncier et d’autres établissemens de crédit en regorgent à 1 pour 100 d’intérêt[1]. Le trésor place à courte échéance des bons à 2 pour 100, et la stagnation des capitaux se fait sentir

  1. Le dernier rapport à l’assemblée générale des actionnaires du Crédit foncier constate qu’au 31 décembre dernier il y avait pour 109 millions de dépôts en comptes courans