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Quant à l’importance du principe de Carnot, elle résulte surtout de ce fait, que les calories qui ont subi une chute ont par cela même perdu en partie leur aptitude à se convertir en travail. Sans doute, si elles se convertissent en travail à quelque température que ce soit, elles le font d’après la loi connue de l’équivalence et suivant le rapport que nous avons si souvent mentionné; mais elles se prêtent avec moins de facilité à cette conversion quand elles ont été portées sur un corps plus froid, et, comme il faudrait une nouvelle chute pour un nouveau travail, il y a plus de chance pour qu’elles demeurent à l’état de calories. C’est ce qui résultera sans doute avec quelque précision de la suite de notre exposé; mais on peut dès maintenant voir dans ce fait une vérité de sens commun, car nous sentons bien qu’une source de chaleur dont nous voulons tirer un travail sera d’autant plus difficile à exploiter que la température en sera moins élevée.


II.

Il nous faut maintenant avancer d’un pas et nous rapprocher d’une définition plus complète du second principe. Nous pourrons le faire en suivant la marche même qu’a suivie la théorie, en considérant successivement le jeu des machines à vapeur, puis celui des machines à air chaud, qui ont excité un instant l’engouement public. Demandons-nous quel est le rendement de ces machines, non point le rendement pratique qui résulte d’une exécution plus ou moins parfaite, mais le rendement théorique, qui résulte du principe même sur lequel elles sont basées[1].

Prenons d’abord les machines à vapeur. Il y a une vingtaine d’années, quand on a commencé à examiner ce genre de machines en leur appliquant les nouvelles idées qui venaient de se produire au sujet de la chaleur, les ingénieurs ont été comme stupéfaits du faible rendement que la théorie assignait à ces moteurs. Il y eut alors une sorte de réaction contre l’enthousiasme que les machines à vapeur avaient d’abord excité. On en vint à craindre pour un moment que ces machines si admirées ne dussent être reléguées au rang des engins les plus grossiers. Elles n’utilisaient, et cela, nous le répétons, en les supposant construites d’une façon parfaite, qu’une portion vraiment misérable de la chaleur produite. Un illustre phy-

  1. On ne perdra pas de vue dans tout ce qui suit qu’il s’agit toujours du rendement théorique. Les pertes de chaleur qui ont lieu par le rayonnement du foyer, par réchauffement des organes de la machine, par d’autres causes accidentelles, ne sont point considérées. La machine est toujours supposée parfaite dans son genre.