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verneur de Bombay en remplacement de son ancien collègue et ami, lord Elphinstone, et pour la quatrième fois il s’éloignait de l’Angleterre. L’Inde jouissait alors du calme le plus parfait. Il n’y avait ni guerres à conduire, ni grandes affaires à discuter. Un gouverneur-général éminent, lord William Bentinck, avait pris le pouvoir en déclarant qu’il fallait administrer la péninsule pour elle-même, et que le bonheur des indigènes devait être le premier des intérêts. Animé d’un profond sentiment de justice et de vives sympathies pour la race conquise, Malcolm était l’homme de cette politique généreuse. Sans bruit ni fracas, il eut l’occasion de faire beaucoup de bien. Peut-être des fonctions si uniformes ne lui plurent-elles pas longtemps, peut-être encore sentait-il le poids de l’âge et les ennuis de l’éloignement. Après quatre années de séjour à Bombay, il résignait son commandement et quittait l’Inde pour toujours. Il avait alors soixante-un ans. Parti simple cadet en 1783, il revenait en 1831 décoré du plus haut grade qu’il fût permis à un serviteur de la compagnie d’obtenir. Durant ce laps de temps, il n’y avait pas eu de grande guerre à laquelle il n’eût pris part, pas de négociation délicate à laquelle il n’eût coopéré. Ayant débuté sans autre patronage que son mérite, il pouvait être donné en exemple, — et c’était à ses yeux un juste sujet d’orgueil, — aux jeunes volontaires que l’Angleterre envoyait chaque année dans ses possessions indiennes.

Sa carrière active était terminée ; il ne lui déplut pas de suivre alors le conseil que le duc de Wellington lui avait donné avec plus d’à-propos longtemps auparavant. Le bourg de Launceston l’envoya siéger à la chambre des communes. C’était trop tard, et cela venait en des circonstances qui lui étaient défavorables. S’il fût entré au parlement deux ans après, lorsque le gouvernement de la compagnie des Indes orientales fut mis en discussion à propos du renouvellement de l’acte qui la constituait, on eût écouté avec déférence ce vieux général indien, et sa parole eût été reçue comme l’expression d’une longue expérience, En 1831, il s’agissait de la réforme électorale. Élevé dans des sentimens de haine envers les idées révolutionnaires de la France, formé à cette grande école militaire et gouvernementale d’outre-mer qui pouvait bien inculquer des idées généreuses, mais non pas développer les passions libérales, Malcolm était encore lié par l’affection, le respect et la reconnaissance au chef du parti conservateur en Angleterre, au duc de Wellington. La mission qu’il avait remplie en France lors du sacre de Charles X lui faisait en quelque sorte une affaire personnelle, de la révolution qui venait de renverser ce monarque. La réforme fut votée, comme on sait. Malcolm y perdit sa popularité et son siège